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Hollywood Interview

« Les femmes ont un rôle important à jouer dans la sauvegarde de notre planète »

30.09.2022
par SMA

Née pendant l’âge d’or d’Hollywood, Jane Fonda était déjà prédestinée à un grand avenir. Et elle n’a pas déçu : de star de cinéma à professeure de fitness, de militante des droits civiques à activiste du climat – Jane Fonda était et est toujours, à 84 ans, en première ligne. L’année dernière, elle a reçu le Cecil B. deMille Award pour l’ensemble de sa carrière. À l’occasion de cet hommage, elle revient sur sa vie et explique pourquoi elle continuera de s’engager pour les combats qui lui tiennent à coeur jusqu’à son dernier souffle.

Jane Fonda, parmi vos films, lesquels vous sont particulièrement chers ?

Je dois en mentionner trois. J’aimerais tout d’abord évoquer Klute parce que c’est un bon film, qu’il m’a valu mon premier Oscar et qu’il a propulsé mon talent d’actrice et ma carrière à un autre niveau. Le deuxième est Coming Home, car le thème des vétérans de guerre me tenait à coeur et que j’ai participé à la production du film. Le troisième est On Golden Pond, parce que je voulais travailler avec mon père avant sa mort: c’était une belle expérience et il a disparu quatre mois après la sortie du film au cinéma.

Avec quels acteurs avez-vous aimé travailler ?

Robert Redford fait certainement partie des acteurs avec lesquels j’ai le plus aimé collaborer. J’ai tourné quatre films avec lui. Je pense aussi à Donald Sutherland – mais je ne le vois pas souvent. La dernière fois, c’était il y a quelques années, au festival du film de Venise. Il ne semblait apparemment pas vouloir me parler – nous avons été en couple et il est aujourd’hui marié. D’une manière générale, la plupart des bons souvenirs que j’ai sont plutôt liés à des femmes qu’à des hommes. Je garde aussi bien sûr de bons souvenirs de mon père. Je pense encore à lui tous les jours.

Votre père, l’icône hollywoodienne Henry Fonda, a beaucoup influencé votre vie. Qu’avez-vous appris de lui ?

Il est en effet très important pour moi. Lorsque j’ai écrit mes mémoires My Life so Far, la fille de Martin Luther King, Yolanda, m’a appelée – je ne me souviens plus de la raison. Je lui ai demandé si son père la prenait sur ses genoux et lui parlait de la vie et des valeurs importantes. Elle a répondu par la négative. C’était la même chose avec mon père. En fait, il ne m’a rien appris directement. Cependant, Yolanda a les sermons de son père et j’ai les films du mien. À travers eux, il m’a appris la justice, l’équité et l’égalité. Il n’était pas bavard et faisait partie de la génération des hommes qui ne voulaient pas montrer leurs émotions. Il n’aimait pas non plus que d’autres personnes s’émeuvent en sa présence. Mais je l’aimais beaucoup et l’admirais.

Les films peuvent nous aider à comprendre autrui.

Vous avez vous aussi beaucoup d’admirateurs, et pas seulement parmi les fans de cinéma. Vous êtes par exemple très engagée dans la lutte contre la crise climatique. En quoi cette cause vous tient-elle si à coeur ?

Il y a de nombreux problèmes dans le monde, mais si nous ne résolvons pas la crise climatique, les autres ne seront plus d’actualité. La science dit que nous devons réduire de moitié les émissions de combustibles fossiles d’ici 2030. C’est très difficile, mais faisable si nous nous y mettons tous ensemble.

C’est ce que vous faites avec vos vidéos « Fire Drill Fridays ».

Exactement. Comme je suis célèbre, mes vidéos ont une grande portée. Lors de notre première année en ligne, en 2020, nous avons atteint neuf millions de spectateurs sur nos plateformes. Mon public cible est surtout composé de femmes plus âgées, qui sont maintenant plus courageuses et prêtes à se battre. Nous sommes la partie de la population qui croît le plus rapidement. J’essaie donc d’encourager les femmes à rejoindre le mouvement pour le climat.

On constate aussi que les résolutions sur le climat et les lois environnementales les plus efficaces sont plus susceptibles d’être adoptées dans les pays qui ont une femme à leur tête ou dont la moitié du parlement est composée de femmes. Les femmes ont donc un rôle important à jouer dans la sauvegarde de notre planète.

Avant le premier confinement, les « Fire Drill Fridays » avaient lieu en direct. Washington et vous avez été arrêtée plusieurs fois dans ce contexte. Pensez-vous continuer ce type d’actions ?

Oui, et j’encouragerai d’autres personnes à suivre la voie de la désobéissance civile si nécessaire. La crise climatique détermine l’avenir de notre civilisation. Tout dépend du fait que nous atteignons les objectifs de réduction des émissions calculées par les scientifiques. J’ai maintenant 84 ans. Le climat sera donc mon combat jusqu’à la fin de ma vie. Je n’hésiterai pas à descendre à nouveau dans la rue pour me battre.

Vous êtes toujours actrice à plein temps. Pensez-vous que le cinéma et la télévision puissent aussi changer le monde ?

Je pense que l’art est particulièrement important en période de chaos et de tumulte. Les films peuvent nous aider à comprendre autrui. Depuis que je suis devenue militante, j’ai cherché à raconter des histoires qui expliquent notre monde et qui favorisent notre empathie. J’essaie d’éviter ce qui est insultant et dévalorisant et qui nous montre moins complexes que nous ne le sommes. Parfois, nous avons aussi simplement besoin de rire et je pense que nous devrions tous rire un peu plus.

Que pensez-vous donc de la « cancel culture », le fait de rejeter quelqu’un publiquement en raison de propos offensants, qui sévit surtout aux États-Unis ?

Il ne faut pas en abuser, mais il était temps que les gens réfléchissent à la manière dont leurs paroles et leurs actes affectent les autres. S’ils font quelque chose de méchant, de cruel, de raciste ou de misogyne, ils doivent aussi rendre des comptes. Nous devons travailler sur notre empathie et cesser de faire du mal autour de nous.

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Vous avez été militante pendant des années et avez évolué dans les cercles politiques. Pourquoi ne vous êtes-vous jamais présentée à un poste politique ?

Je ne suis pas faite pour cela. Quand je vois de bonnes politiciennes comme Amy Klobuchar ou Pramila Jayapal poser des questions lors de débats, je me demande toujours comment elles font. Je ne suis pas une bonne leader, ce n’est pas moi qui ai les idées les plus brillantes. Il est important de comprendre ses forces et ses faiblesses en vieillissant. C’est pourquoi je m’entoure de personnes intelligentes et j’essaie de diffuser leurs idées.

Où trouvez-vous l’énergie à 84 ans ?

Je dors neuf heures, je fais du sport et je mange sainement. L’exercice physique est vraiment important. J’ai subi trois opérations de la hanche ces dernières années. On s’en remet mieux quand on est en bonne santé et actif.

Votre série Netflix Grace and Frankie compte aujourd’hui sept saisons. Quel est votre rapport à la télévision et au streaming ?

Les dix premières années de ma vie, je n’ai pas eu de télévision. Même plus tard, je ne l’ai jamais beaucoup regardée car je préférais le plus souvent être dehors et grimper aux arbres. La télévision n’était tout simplement pas dans mon ADN. Un jour, j’ai regardé une cérémonie de remise d’awards et j’ai réalisé que je ne connaissais aucune des personnes nominées pour des émissions de télévision. Je me suis aussi rendu compte avec l’âge qu’on me proposerait plutôt des rôles à la télévision et que je devrais donc me renseigner à ce sujet.

Par ailleurs, pendant la pandémie, les émissions de télévision étaient particulièrement appréciées…

Exactement. J’ai plus ou moins regardé tout ce qui a été diffusé à cette époque. Aujourd’hui, je reconnais quasiment tous les nominés (rires). Je pense que je vais garder cette habitude. Je vis seule et je n’ai personne avec qui me disputer pour savoir si nous regardons un match de basket ou « Dancing with the Stars ».

Vous avez mentionné les cérémonies de remise de prix. Quels sont les moments forts que vous y avez vécu ?

J’ai assisté à tellement de cérémonies de remise de prix que je ne me souviens même plus de la plupart d’entre elles. La première fois remonte à 1962 lorsque j’ai été élue « Most Promising Young Actress » aux Golden Globes. Marilyn Monroe était là – je m’en souviens encore. J’ai aussi accompagné mon fils Troy Garity aux Golden Globes, qui était nominé pour Soldier’s Girl. C’était bien sûr un moment de grande fierté pour moi. Il aurait dû gagner ! Au lieu de cela, Al Pacino a remporté le prix – mais perdre contre Al Pacino, ce n’est pas si tragique.

Vos enfants n’ont pas été médiatisés. Beaucoup de gens ne savent probablement pas que vous avez adopté une fille dont les parents appartenaient au mouvement des Black Panthers. Comment cela s’est-il passé ?

Mon deuxième mari, Tom Hayden, et moi dirigions un camp pour les enfants de membres de différents syndicats. Il y avait aussi des enfants de Black Panthers. Tous nos amis militants envoyaient leurs enfants dans ce camp. Lulu, dont le vrai nom est Mary Williams, était l’une de ces enfants. Je ne veux pas entrer dans les détails, mais cette fille a touché mon coeur. Elle a eu une enfance difficile et j’ai fini par demander à sa mère, qui avait divers problèmes, si Lulu pouvait venir vivre avec nous. Elle n’a pas été adoptée légalement, mais elle fait partie de ma famille depuis l’âge de treize ans, tout comme je considère l’enfant de Roger Vadim et Annette Stroyberg, Nathalie Vadim, dont j’étais la belle-mère, comme faisant partie de ma famille.

Interview Marlène von Arx
Photos HFPA

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