Aujourd’hui, on pense souvent qu’être une femme moderne signifie savoir conjuguer parfaitement sa vie privée et la vie de mère avec ses aspirations professionnelles. Néanmoins, il ne s’agit pas d’une tâche facile. Comment les femmes peuvent-elles se réaliser tant sur le plan familial que professionnel et quels défis peuvent-elles rencontrer? Nous avons posé ces questions à Marianne Maret, Conseillère aux États, épouse, maman de quatre enfants et grand-maman de cinq petits-enfants.
Marianne Maret, pourquoi avez-vous choisi de faire de la politique et comment votre carrière a-t-elle débuté?
J’ai grandi dans une famille où l’on parlait de politique avec des sensibilités différentes, mais toujours avec respect. De manière générale, je pense donc que cela a suscité chez moi l’intérêt pour la chose publique. D’ailleurs, j’aime le débat d’idées. Ainsi, lorsque j’ai été approchée pour me présenter sur une liste pour le Conseil municipal, j’ai immédiatement été intéressée. J’ai alors commencé mon parcours politique en qualité de Conseillère municipale dans ma commune, Troistorrents, en 1997. J’ai assumé ensuite les fonctions de Présidente de Commune, Députée, Présidente de la Commission de gestion du Grand Conseil et Présidente de la Fédération des Communes valaisannes. Actuellement je suis Conseillère aux États.
Avant de vous lancer dans la politique à plein temps, vous vous êtes occupée de votre famille pendant 19 ans. Comment avez-vous réussi à conjuguer votre vie familiale avec vos aspirations professionnelles?
Dès lors que nous avions une grande famille, dont un fils handicapé, la question de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale ne s’est pas posée. D’ailleurs, à l’époque, il n’y avait pas de structures d’accueil de l’enfance dans ma commune et nous n’avions pas de famille sur place. La disponibilité de mon époux a été une clé du succès. Pendant ces belles années, je me suis épanouie et j’ai acquis une expérience de vie non négligeable. Le fait d’assumer parallèlement la fonction de Conseillère municipale était déjà un défi organisationnel. En plus, avant de devenir Présidente de la Commune, durant quatre ans, j’ai également exercé un emploi à 60%. J’y ai expérimenté la conciliation de la trilogie famille, travail et politique.
Qu’est-ce qui vous plaisait le plus et le moins de votre quotidien de femme au foyer?
Je n’aimais pas le côté répétitif et ingrat de certaines tâches, mais l’éducation de nos quatre enfants, avec tout ce que cela implique en termes de psychologie et de défis logistiques, me plaisait beaucoup. Il a aussi fallu apprendre à calculer et, aujourd’hui, cette expérience me permet d’être proche de certaines réalités dans l’exercice de mon mandat.
Quels sont les défis majeurs auxquels sont confrontées les femmes qui ont des enfants et qui veulent s’épanouir professionnellement?
Tout d’abord, elles doivent sentir si les enfants sont heureux dans l’organisation mise en place. Trouver une solution de garde qui réponde aux besoins spécifiques des enfants et des parents représente également un autre défi de taille. Les femmes doivent en outre pouvoir avoir l’esprit libre pour assumer tant leur fonction professionnelle que leur fonction de mère. Pour que cela soit possible, il faut que tout roule. Enfin, il faut également mettre en place un vrai partage des tâches lorsque cela est possible; la responsabilité de l’organisation familiale ne doit plus incomber uniquement à la maman.
Comment les employeurs peuvent-ils aider les femmes à surmonter ces défis?
Dans la mesure du possible, les employeurs doivent assouplir certaines exigences (horaires, possibilités de télétravail, etc.). Ensuite, ils peuvent simplement montrer de l’empathie envers les collaboratrices lorsqu’elles traversent des écueils. Je pense en effet que plus l’écoute est présente dans l’environnement de travail, plus la qualité du travail effectué sera au rendez-vous. Ces éléments doivent aussi prévaloir pour les pères, afin de répartir au mieux les responsabilités au sein de la famille.
Votre parcours de femme au foyer et votre rôle de mère ont-ils été formateurs pour vous?
Bien sûr! Lorsque j’ai décidé de rester au foyer, j’ai tacitement endossé la totalité de la responsabilité de la maisonnée. Il s’agit de s’occuper des enfants du début à la fin de la journée et de les accompagner dans tous les apprentissages extrascolaires. Il faut aussi jongler avec les déplacements pour le sport, la musique et, en ce qui me concerne, avec les prises en charge spécifiques pour notre fils handicapé physique et mental. A cela s’ajoutent les défis pour équilibrer un budget dans lequel vous tenez à pouvoir écrire les sports, les loisirs et les vacances. Assumer les enfants du matin au soir requiert également des compétences en créativité, psychologie, gestion des conflits et diététique car, à aucun moment, on ne peut se dire que d’autres le feront peut-être à notre place. Le risque c’est de ne plus exister qu’à travers ces missions. Cependant, lorsqu’on arrive à s’épanouir dans ce modèle, on devient très solide. C’est pourquoi, à mon sens, ces années devraient systématiquement figurer sur un CV.
Quels conseils donneriez-vous à une jeune maman qui aspire à se réaliser tant sur le plan familial que professionnel?
Pour qu’il n’y ait pas un stress supplémentaire lié à des failles dans le système, l’organisation doit être béton. Afin d’éviter l’épuisement de la maman, le modèle doit être assumé par les deux parents et il ne devrait jamais avoir de culpabilité quant au modèle choisi. Tous ont leurs forces et faiblesses, je les ai tous expérimentés.
Selon vous, qu’est-ce qu’une femme moderne en 2021?
Selon moi, une femme moderne en 2021 est une femme qui est épanouie et qui a réussi à s’affranchir des codes. En effet, malgré les apparences, en 2021, il subsiste toujours autant de codes qu’il y a 40 ans; ils ont seulement changé!
Interview Andrea Tarantini
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