Comment comprendre les besoins de son enfant ? Comment lui permettre de se développer dans les meilleures conditions tout en lui fournissant un cadre nécessaire ? Dans cette interview, Anne Jeger, psychologue clinicienne à Lausanne et psychologue référente des associations lafamily.ch et VIA, répond à ces questions.
Anne Jeger, comment transmettre à son enfant de la bienveillance, de l’écoute, mais aussi un cadre avec des règles claires ?
On doit toujours tenir compte de l’âge de l’enfant, de sa maturité, qu’elle soit cérébrale ou émotionnelle, de ses habilités et de ses compétences. Par exemple, un enfant de deux ans ne peut pas réguler ses émotions seul. L’isoler dans sa chambre peut donc lui provoquer des angoisses. Il est nécessaire de lui transmettre à la fois de l’amour et des règles claires et constantes qui vont l’aider à se structurer et le rassurer. Cela passe par le fait de répéter souvent les mêmes choses. Poser des règles, c’est aussi lui apprendre des valeurs de respect, de non-violence et de partage.
Tout cela ne s’apprend pas à l’école. En tant que parents, il est important d’être curieux et de s’instruire, notamment grâce à l’échange avec d’autres parents ou aux Ecoles de parents qui existent un peu partout.
Comment transmettre à son enfant des valeurs et de la confiance en soi, qui lui permettront ensuite de s’insérer dans la société ?
La confiance en soi passe par le faire. Il est important de prendre le temps d’encourager son enfant à essayer, à tomber et à se relever. Lui montrer ou faire avec lui, mais pas à sa place, car un enfant apprend par imitation. Solliciter son aide est un bon moyen pour l’enfant de gagner en confiance.
Comment savoir quels sont les besoins de son enfant et comment les satisfaire ?
Les besoins des enfants, qui dépendent de leur âge, peuvent s’apprendre dans les livres. Leur identification commence très tôt en posant des questions simples : Est-ce tu as faim ? Est-ce que tu veux jouer ?
Quelles activités peut-on intégrer dans la routine quotidienne pour stimuler le développement cognitif des enfants ?
Les jeux de société tels que le Memory, les puzzles, les calculs mentaux, les jeux de mémoire et de formation de phrases comme le cadavre exquis, le sport, la danse ou encore la lecture, sont de bons stimulants. Ce qui compte avec les enfants, c’est le temps qualitatif passé avec eux.
Comment gérer l’exposition des enfants aux écrans et quels sont les risques associés à un usage excessif ?
Il faut leur expliquer le pour et le contre de l’utilisation des écrans et instaurer des règles très claires dès leur plus jeune âge. Plus le cadre est clair, plus l’enfant est rassuré. Les risques d’une utilisation excessive sont la dépendance, le stress, le manque, les troubles de l’humeur, du sommeil et de la concentration, et le risque d’entraver ses habilités sociales, surtout chez des enfants qui sont déjà introvertis. C’est le mal du siècle, qui concerne aussi d’ailleurs les parents.
Que peut-on faire pour augmenter leur capacité de concentration et d’attention ?
Il faut les envoyer jouer dehors davantage, les rendre curieux, les emmener dans la nature, dans les musées ou des expositions interactives. Les jeux de réceptivité sensorielle sont aussi très intéressants pour apprendre à fixer son attention sur un sens en particulier.
Comment favoriser le développement social des enfants et encourager des relations saines avec ses pairs ?
Ce qui est important, c’est d’apprendre très tôt aux enfants les valeurs de générosité et de partage, d’ouverture aux autres et à la différence. Pour cela, les enfants doivent passer du temps avec des amis, des adultes, faire des activités extrascolaires et rejoindre des groupes tels que le scoutisme. La question de l’empathie est fondamentale car pouvoir se mettre à la place de l’autre, surtout en cas de conflit, permet d’éviter de lui faire du mal.
Quelles sont les stratégies efficaces pour encourager l’autonomie chez les enfants tout en assurant leur sécurité ?
Il est très important de laisser les enfants réfléchir, prendre des initiatives et participer à la vie communautaire. L’autonomie passe aussi par le fait de laisser ses enfants tranquilles. Aujourd’hui, les parents, qui veulent bien faire, sont trop sur leurs enfants, qui sont surstimulés et arrivent à saturation. Il faut les laisser jouer seuls pour développer leur monde imaginaire, et cela sans consigne. Moins on fait ingérence, plus les enfants prennent confiance en eux.
Quels sont les signes indicateurs de stress ou d’anxiété chez les enfants, et comment peut-on les aider à y faire face ?
Sur le plan physique et comportemental, les signes sont l’épuisement physique, l’irritabilité, le refus des consignes, ou des difficultés à le stimuler. On peut aussi relever des tics, de la nervosité, des problèmes d’attention et de mémoire, la baisse des résultats scolaires et des manifestations psychosomatiques telles que des maux de ventre, de tête ou de l’eczéma. Sur le plan psychique et émotionnel, on retrouve la peur de l’échec et de mal faire, l’anxiété de performance, la peur de la vie voire la phobie scolaire. On note également une dévalorisation de soi, l’absence de désir, la quête de perfection ou l’obsession. Il faut particulièrement faire attention aux symptômes exacerbés et chroniques.
Pour y remédier, je recommande la sophrologie, la méditation, la détente, les groupes de soutien ou des activités telles que l’équitation. Il est fondamental d’apprendre aux enfants à respirer et à développer des pensées positives, notamment la gratitude. Il s’agit d’offrir un cadre de vie calme et un espace d’écoute, surtout en fin de journée.
Comment traiter les situations de deuil, de séparation ou de divorce dans la vie d’un enfant et minimiser leur impact sur son bien-être émotionnel ?
Un enfant confronté à ces chocs a besoin d’un espace bienveillant pour exprimer son chagrin sans jugement. Il est essentiel de lui dire la vérité sur les événements. Dans le cas d’un divorce, il a besoin de savoir qu’il sera toujours aimé par ses deux parents de manière inconditionnelle. L’enfant ne doit pas être mêlé aux problèmes d’adultes ; il ne faut surtout pas en faire son messager ou son confident. La mise en place d’une routine permet de lui donner une structure. Enfin, il faut veiller à ce que les enfants fréquentent les membres de la famille élargie.
Comment aborder les questions de sexualité et d’éducation sexuelle avec ses enfants à différentes étapes de leur croissance ?
Utiliser des livres est une bonne méthode pour apprendre le respect de son corps et du corps d’autrui. Il est important d’utiliser des mots simples.
Pour en savoir plus sur le sujet, Anne Jeger est l’auteure du livre Regard d’une psychologue sur les enfants, la vie de famille et les épreuves du couple.
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