le 8 mars, une histoire de femmes en colère
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Le 8 mars, une histoire de femmes en colère

24.02.2020
par Laetizia Barreto

Depuis plus d’un siècle, la tradition d’avoir une journée dédiée aux femmes est ancrée dans notre société. Aujourd’hui, le 8 mars est reconnu mondialement. Pourtant, historiquement, la date de la journée des femmes a largement varié d’un pays à l’autre. 

Célébration historique 

Saviez-vous que la journée des femmes tient son origine du parti socialiste? Sa première édition s’est tenue en mai 1908, à Chicago, aux Etats-Unis. Plus de 1500 participantes ont applaudi un discours engagé pour la cause des ouvrières. C’est l’activiste marxiste Corinne S. Brown qui préside alors l’Alliance des femmes de l’Illinois. Elle défend leurs droits à l’égalité économique et politique.

Le jour des femmes (Women’s day) devient dès lors un jour officiel de l’agenda socialiste américain. En Europe, il faut attendre quelques années avant que Clara Zetkin, journaliste et politicienne allemande, propose de suivre l’initiative de ses consœurs outre-Atlantique, lors d’une conférence socialiste à Copenhague. Elle gagne les votes des déléguées des dix-sept pays présents. Les luttes et revendications des femmes résonnent pendant plus de 30 ans dans de nombreux pays avant que le premier accord international affirmant le principe d’égalité entre les deux sexes soit acté par la Charte des Nations Unies en 1945.

Et en Suisse?

Les ouvrières helvètes créent, dès 1885, leurs premières associations en Suisse alémanique. Quelques années plus tard, en 1890, cinq de ces groupes se réunissent et forment l’Union suisse des ouvrières. Ces femmes prolétaires se sont battues pour l’amélioration des assurances sociales, la protection des femmes en couche et le suffrage féminin. Le 19 mars 1911, les socialistes organisent la première journée des femmes dans plusieurs villes suisse-allemandes.

Du côté romand, le mouvement arrive plus tard. La célébration d’un jour dédié à la gent féminine se fera à partir de 1914. Six cents personnes se réunissent à Genève pour une journée d’action et de revendications. Cette différence temporelle entre les régions linguistiques s’explique: «en Suisse alémanique existait alors une organisation d’ouvrières très active d’une part, et de l’autre, le SPD (parti socialiste allemand) était à cette période très actif dans les questions femmes, notamment grâce à Clara Zetkin, à la différence du PS français. Et il existait de bons contacts entre Zetkin et la Suisse», détaille Brigitte Studer, professeure et docteure en Histoire contemporaine de la Suisse.

Du droit de vote aux fleurs

En 1975, l’ONU retient officiellement la date du 8 mars comme la journée internationale des femmes. Sans le savoir, ce sont les femmes russes qui ont scellé cette date. En effet, en Russie, la première manifestation de ce type a lieu le 8 mars 1913. Quatre ans plus tard, à la même date, des milliers de femmes russes sortent dans les rues pour réclamer du changement et notamment le droit de vote. Plutôt efficace, puisqu’elles l’obtiènent peu après.

Au fil des ans, la célébration du 8 mars a perdu sa connotation politique, mais reste une fête importante pour les russes. C’est d’ailleurs un jour férié officiel. La population le fête donc un jour avant au travail ou à l’école. La coutume veut que tous les hommes fassent des cadeaux aux femmes de leur entourage. «Je remarque qu’en occident, ces dernières années, on met de plus en plus l’accent sur le fait que le 8 mars est la journée des droits des femmes, alors qu’en Russie c’est la journée où l’on célèbre les femmes», témoigne Anastacia Satoutchina, qui a vécu en Russie jusqu’à ses 14 ans, avant de s’installer à Fribourg (CH).

Toutes les femmes sont célébrées

«Toutes les femmes sont célébrées, des petites filles aux grands-mères et elles reçoivent toutes des fleurs. Si tu n’achètes pas de fleurs aux femmes qui sont dans ta vie, tu es très mal vu», explique Vazgen Papykants, pilote russe expatrié aux Etats-Unis. «Je pense que les boutiques de fleurs russes font le même chiffre d’affaire le 8 mars que le 14 février, voire plus. Chaque femme aura droit à un bouquet, une carte ou un cadeau», confirme Anastacia.

D’autres coutumes pour le 8 mars

En Italie, il est d’usage d’offrir un rameau de mimosa aux femmes lors du 8 mars ou alors de confectionner une tourte mimosa. La fleur représentait à l’époque un symbole politique. En 1955, plusieurs femmes avait été arrêtées parce qu’elles distribuaient du mimosa devant l’usine Ducati, à Bologne. Elles appelaient les ouvrières à réclamer les mêmes droits que les hommes, et avant tout l’égalité salariale.

Dans plusieurs pays d’Afrique, le 8 mars est un jour reconnu férié, comme par exemple en Ouganda, en Erythrée, au Cameroun ou encore au Burkina Faso. Sur d’autres continents, certains pays donnent congé uniquement aux femmes. Comme à Madagascar, en Chine, en Macédoine ou encore, récemment, la ville de Berlin.

En Amérique latine, il est coutume pour les femmes de sortir dans la rue. Elles clament publiquement les injustices qu’elles vivent au quotidien. L’année passé le quotidien espagnol «El pais» titrait un de ses articles «Le 8 mars en Amérique latine ne se fête pas, il se lutte», un bon résumé de la situation. La dénonciation des violences envers les femmes reste une problématique dans la majorité des pays d’Amérique du Sud, mais aussi à un niveau mondial.

Objectifs clés de l’agenda 2030 par l’ONU

D’ici 2030, l’ONU s’est fixé plusieurs missions concernant l’égalité entre hommes et femmes, telle que:

  • éradiquer toute forme de discrimination contre les femmes et les filles partout dans le monde
  • éliminer toute forme de violence contre les femmes, autant dans la sphère publique que privée, incluant le trafic d’humain et sexuel ainsi que toute autre forme d’exploitation
  • mettre un terme à toutes les pratiques blessantes, telle la mutilation génitale ou les mariages forcés, d’enfant ou arrangés à la naissance
  • une éducation primaire et secondaire équitable, gratuite et de qualité soit accessible pour toutes les filles et garçons

Texte Laetizia Barreto

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