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Interview Jeunesse

Allan Petre : De Seine-Saint-Denis à la NASA : « Beaucoup de jeunes pensent que c’est impossible parce que c’est compliqué »

12.09.2024
par Océane Ilunga

Originaire de Villemomble en Seine-Saint-Denis, en France, Allan Petre, 24 ans, a su transformer son rêve d’enfant en réalité en rejoignant la prestigieuse NASA en janvier 2024. Son parcours, jalonné d’obstacles et de réorientations, démontre qu’avec persévérance et passion, tout est possible. De ses débuts modestes à son rôle d’ingénieur aérospatial au Jet Propulsion Laboratory, Allan est aujourd’hui un modèle de réussite et d’inspiration pour toute une génération. Dans cette interview, il partage son incroyable aventure, ses défis, et ses conseils pour les jeunes aspirants scientifiques.

Allan Petre

Allan Petre, comment décrirais-tu l’enfant que tu étais ?

Je dirais avant tout que j’étais un enfant curieux. C’est cette curiosité qui m’a conduit à ma passion pour l’aérospatiale. Si je n’avais pas eu ce désir d’apprendre et de comprendre le monde, je ne serais probablement pas là où je suis aujourd’hui. Toujours avide de découvrir de nouvelles choses, mes parents disaient souvent que j’avais la tête dans les nuages, et c’est toujours vrai aujourd’hui (rires). En plus d’être curieux, j’étais aussi quelqu’un de réservé et profondément passionné.

Quels étaient tes rêves et aspirations en grandissant en Seine-Saint-Denis ?

Mon rêve, dès que cette passion est née, a été de travailler un jour à la NASA. Je l’exprimais ouvertement, sans hésitation, même quand j’étais en primaire. Cependant, cela m’a causé des problèmes car beaucoup de professeurs m’ont découragé, affirmant qu’il était trop difficile d’entrer à la NASA pour un non-Américain. Cette désillusion m’a poussé à ne pas m’orienter initialement vers ce domaine. J’ai donc commencé par des études en économie, ce qui, rétrospectivement, semble avoir été un chemin prédestiné. En débutant un DUT en gestion des entreprises et administrations (GEA), je me suis rapidement rendu compte que ce secteur ne me plaisait pas. Cette expérience m’a montré ce que c’était que de ne pas être heureux dans ce qu’on fait, et m’a motivé à changer de voie pour poursuivre ce qui me passionnait vraiment.

Une fois réorienté, je ne voyais plus les obstacles. Malgré deux heures de transport matin et soir, et un travail le week-end, je ne ressentais pas la fatigue parce que c’est moi qui ai choisi de me réorienter, donc je n’avais pas le droit de me plaindre. Même si j’ai vécu deux ans et demi sans vie sociale, voyant rarement mes amis et ma famille, je savais que ma passion justifiait ces sacrifices.

Tu es passé d’études où il est quasiment sûr d’obtenir un job à des études un peu plus risquées. Quelle a été la réaction de tes parents face à ce changement ?

Ma mère m’a toujours encouragé à ne pas rester dans quelque chose qui ne me plaît pas. Mon père, en revanche, était plus procédural : pour lui, il fallait finir le diplôme commencé avant d’envisager autre chose. Au moment où j’ai choisi de me réorienter, il n’était pas forcément d’accord, mais une fois la décision prise, mon père m’a soutenu. Le plus dur, c’est de faire le pas, d’assumer qu’une formation ne nous plaît pas et de partir. Malheureusement, beaucoup d’étudiants restent dans une formation qui ne les épanouit pas, même s’ils savent qu’un autre domaine leur plairait plus. Ils ne changent pas simplement parce qu’ils n’osent pas sauter le pas. Il n’y a pas de mal à se réorienter. Si vous avez une passion, foncez, au moins vous n’aurez pas de regrets.

Que réponds-tu à ces personnes qui disent qu’elles n’ont pas de passion ?

Je comprends qu’on puisse ne pas avoir de passion précise, mais on a toujours un intérêt pour un domaine où l’on pense pouvoir s’épanouir. Le plus difficile, c’est de découvrir cet intérêt. Personnellement, j’ai été très proactif dans ma recherche. J’ai participé à des salons des métiers, à des forums et posé de nombreuses questions.

Tu es en Californie, au Jet Propulsion Laboratory. Quels sont tes rôles en tant qu’ingénieur aérospatial ?

Je travaille dans le département propulsion thermique et matériaux. Le rôle de l’ingénieur aérospatial est de développer, concevoir et produire des systèmes, des vaisseaux spatiaux, des satellites, des lanceurs spatiaux (fusées), et tout ce qui est lié au spatial et destiné à être envoyé dans l’espace. En particulier, je travaille sur une sonde que nous allons diriger vers Vénus. Mon rôle consiste à m’occuper de tout ce qui concerne l’aspect système. L’ingénierie système implique de déterminer comment placer les composants, comment les relier aux phénomènes physiques de la planète et à un système spatial. Ce n’est pas forcément mathématique, mais il faut avoir un bon bagage en physique.

Que conseillerais-tu aux jeunes qui voudraient suivre tes pas ?

Le premier conseil serait de ne pas partir défaitiste, de ne pas se dire qu’on ne va pas y arriver avant même d’avoir essayé. Beaucoup de jeunes pensent que c’est impossible parce que c’est compliqué, mais il ne faut pas s’autolimiter et ne pas avoir peur de faire des erreurs.

Mon deuxième conseil est d’avoir un objectif clair. Il faut se renseigner au maximum et connaître les différentes étapes pour atteindre son rêve, et ce quel qu’il soit. En se renseignant sur le type de formation et d’école nécessaire pour atteindre son but, on a une vision plus claire, ce qui renforcera la motivation.

Y a-t-il eu des mentors ou des personnes qui vous ont inspiré et influencé votre parcours ?

Certaines personnes m’ont inspiré parce qu’elles sont dans le domaine de l’aérospatial, comme Bill Nelson, ancien astronaute et directeur actuel de la NASA, ou Kalpana Chawla, ancienne astronaute de la NASA. D’autres, comme Nelson Mandela, Martin Luther King Jr., et Kevin Durant, m’ont influencé par leur résilience, leur leadership, et leur détermination dans leurs domaines respectifs.

Que pensez-vous de SpaceX ?

SpaceX est une entreprise privée, et beaucoup de gens confondent souvent SpaceX avec la NASA. La NASA est une agence spatiale gouvernementale, l’agence spatiale américaine, financée par le gouvernement américain qui lui attribue un budget tous les deux ans pour effectuer des recherches scientifiques et contribuer à l’évolution spatiale. En revanche, SpaceX est une entreprise à but lucratif. Elle a innové dans de nombreux domaines et est souvent précurseur. SpaceX permet aux Américains de réaliser des vols habités, ce qui est une avancée significative pour l’exploration spatiale.

Souhaites-tu devenir astronaute ?

Oui, j’y pense. Pour l’instant, je suis encore trop jeune, mais je compte certainement postuler à la prochaine sélection, qui aura sûrement lieu dans une dizaine d’années. Sinon, j’aimerais pourquoi pas travailler à l’ESA (Agence spatiale européenne) ou être pilote de ligne.

En dehors de ton travail à la NASA, as-tu d’autres passions ?

Le basket, le foot, le tennis, la géopolitique ainsi que les animaux et les océans.

Comment voyez-vous l’avenir de l’aérospatial et quelles sont les innovations qui vous enthousiasment le plus ?

Je pense que l’avenir de l’aérospatial sera très chargé. Les prochaines années seront principalement dédiées à une ère d’exploration spatiale et aux vols habités. Nous allons retourner sur la Lune, et ensuite préparer un voyage vers Mars, ce qui est extrêmement enthousiasmant.

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