l'intelligence artificielle ne remplacera jamais la pensée humaine
Digitalisation Interview

«L’informatique quantique accélère le développement de matériaux et médicaments»

29.06.2022
par Andrina Brodbeck

L’informatique quantique et l’intelligence artificielle remplaceront-elles l’informatique traditionnelle? Dans l’interview qui suit, Christian Keller répond à cette question, tout en expliquant pourquoi la Suisse est un site idéal pour les entreprises technologiques et ce qui lui plaît dans sa position de CEO d’IBM Suisse. 

Christian Keller, IBM est active dans notre pays depuis 1927 et y possède également un laboratoire de recherche. Pourquoi la Suisse est-elle le bon endroit pour les entreprises informatiques ?

La Suisse est un marché très intéressant. C’est une économie compétitive et ouverte qui dispose de grandes entreprises internationales tout comme de PME solides et innovantes. De plus, le système de formation dual est unique et offre aux entreprises technologiques un pool de compétences attrayant. Ce n’est pas un hasard si quatre prix Nobel sont issus de notre laboratoire de recherche. Nous en sommes aussi fiers que de notre histoire presque centenaire en Suisse.

En quoi votre position de CEO d’IBM Suisse est-elle enrichissante pour vous ?

En tant que CEO, j’ai la possibilité de contribuer activement au succès de la Suisse. C’est passionnant et enrichissant de soutenir les entreprises dans leur transformation numérique et de relever les défis de la sécurité et du cloud. Je m’implique aussi dans les débats sociopolitiques, afin d’encourager la confiance dans les nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle ou l’informatique quantique.

Selon IBM, l’Europe est la deuxième région du monde la plus touchée par les cyberattaques. Qu’en est-il de la Suisse et que faut-il faire pour améliorer la situation à cet égard ?

Il faut ici apporter une nuance. Les banques et les assurances ont déjà un niveau de sécurité élevé et sont moins vulnérables que l’industrie ou le secteur de la santé et de l’énergie par exemple. Malheureusement, les cybercriminels trouvent souvent des portes d’entrée en raison de mises à jour de logiciels non effectuées. L’authentification à deux facteurs fait souvent défaut. 

Dans le domaine de la cybersécurité en particulier, l’utilisation de l’intelligence artificielle est impérative pour développer des mécanismes de défense.

Le concept de «confiance zéro» est également loin d’être répandu. Le principe de base de la sécurité est qu’il ne faut faire confiance à personne. Les droits d’accès devraient donc être réduits au strict minimum. En outre, il faut toujours partir du principe qu’il existe des failles de sécurité. Les aspects sécuritaires doivent être pris en compte déjà au stade du développement, et non pas seulement après coup – c’est ce que l’on appelle « secure by design ».

IBM est, avec Microsoft et Google, l’une des entreprises leaders dans le domaine de l’informatique quantique. Les ordinateurs quantiques vont-ils venir remplacer les superordinateurs ?

En l’état, il n’y aura pas de remplacement, mais une coexistence. Les modèles informatiques traditionnels subsistent dans de nombreux domaines. L’informatique quantique présente des avantages pour la gestion de volumes importants de données et d’une multitude de variables, comme dans les calculs de risques complexes, les optimisations ou les simulations dans la recherche. L’informatique quantique accélère le développement de matériaux et médicaments, pour ne citer que deux points forts de la recherche d’IBM en Suisse.

Quelle est la fiabilité de l’intelligence artificielle ? 

Il est essentiel de comprendre que l’intelligence artificielle ne remplace pas la pensée humaine, mais qu’elle l’étend. Seule une IA transparente, explicable et qui n’abuse pas des données dont elle dispose est digne de confiance. Les quantités énormes de données générées ne peuvent pas être totalement gérées par des processus manuels. Dans le domaine de la cybersécurité en particulier, l’utilisation de l’intelligence artificielle est impérative pour développer des mécanismes de défense. Elle est également déjà présente dans de nombreux domaines de notre vie quotidienne sans que nous nous en rendions compte, par exemple pour le tri des e-mails ou
des photos.

Certains certificats comme le « Digital Trust Label » permettent d’attester qu’une application d’IA est digne de confiance. La pensée humaine et l’intelligence artificielle coexistent et continueront à le faire. Dans les domaines où la créativité est nécessaire, le cerveau humain est clairement supérieur à l’IA. Toutefois, dans le traitement du langage, l’IA recèle un potentiel important, qui est encore loin d’être épuisé. L’intelligence artificielle n’en est qu’à ses débuts. 

La technologie est un domaine qui évolue rapidement. Comment est-il possible de rester à la page et d’innover ? 

Une solide formation de base combinée à une formation continue constante sont la clé. La technologie est un champ d’apprentissage infini. Chez IBM, nous attendons de tous les collaborateurs, à tous les niveaux, qu’ils suivent au moins 40 heures de formation continue par an pendant leur temps de travail. Une collaboration entre l’industrie et les hautes écoles spécialisées, les universités ainsi qu’avec l’EPFZ et l’EPFL est également fondamentale pour le développement de nouveaux programmes de formation.

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