Aimer et chérir son corps
« Tous les corps sont des bons corps », tel est le slogan prôné par les militantes de plus en plus nombreuses du Body Positive. Cette tendance libératrice soutient que la beauté n’est qu’une construction sociale et invite les femmes à retrouver une relation de bienveillance et de respect avec leur corps.
Le mouvement est aujourd’hui prôné par de nombreuses femmes et féministes qui se montrent fièrement avec leurs imperfections et invitent tout un chacun à adopter une attitude indulgente envers eux-mêmes. C’est notamment le cas sur les réseaux sociaux avec des comptes francophones tels que celui d’Amal Tahir.
Nous avons justement eu l’opportunité de discuter de cette thématique avec cette jeune créatrice de contenu et coach en développement personnel de 27 ans. Déterminée, ouverte d’esprit et ambitieuse, Amal aborde sur différentes plateformes des sujets encore tabous tels que la sexualité, la contraception, le développement personnel, le Body Positive et la confiance en soi. Son message s’adresse principalement aux femmes qui remettent en question les normes actuelles de la société et qui souhaitent voir les mentalités évoluer.
Aimer son corps, enfin !
Dans le Body Positive, il est souvent dit que l’essentiel est d’accepter son corps tel qu’il est. Toutefois, Amal voit les choses autrement : « C’est une phrase que je ne comprends pas et qui n’a selon moi aucun d’intérêt. J’accepte qu’il n’y ait plus mon plat préféré au restaurant ou qu’il ne fasse pas beau aujourd’hui. Mais le corps n’est pas là pour être accepté, il est là pour être aimé, respecté, chéri. » Pour elle, le plus important est plutôt de remercier son corps et de le comprendre. « En écoutant les signaux de son corps, on lui montre qu’on le respecte et seulement alors l’amour de soi suivra. Cela ne veut toutefois pas dire que la confiance en soi devient inébranlable. On peut en effet avoir de mauvais jours, des soucis de santé, voir son corps changer et ne pas l’aimer. Mais le chérir, le comprendre et le gratifier, ce sont des piliers qui permettent d’entretenir une relation saine avec son corps peu importe les changements qu’il subit », affirme Amal.
Il s’agit donc avant tout de se réapproprier son corps et d’être indulgent envers soi-même. La créatrice de contenu explique d’ailleurs qu’aujourd’hui, « on parle davantage de Body Neutrality, car il est normal de ne pas toujours être positif avec son corps et de ne pas l’aimer constamment. L’idée est principalement de ne pas remettre l’entièreté de sa valeur sur son aspect physique. »
Bienveillance et respect, un parcours non sans embûche
Malgré l’engouement pour ce mouvement positif, le chemin vers l’affirmation de soi peut prendre un certain temps. Lorsque nous demandons à Amal quelle est sa relation avec son corps, elle nous explique que son cheminement vers une relation bienveillante n’a pas été simple : « Ma relation avec mon corps a pris du temps à devenir celle qu’elle est aujourd’hui. J’ai grandi dans les années 2000 qui ont promu un idéal de minceur. J’ai grandi avec des skiny icons tels que Naomi Campbell, Britney Spears ou encore Kate Moss. Ce n’était pas une époque où l’on mettait en avant les vergetures, la cellulite ou les courbes, ce qui était compliqué pour l’image corporelle des femmes. J’ai eu des troubles du comportement alimentaire pendant plusieurs années. Cette culture de la maigreur était réellement inculquée en moi et j’avais toujours peur de ne pas être assez mince, de ne pas être normale. Je n’avais pas de femme ronde comme modèle autour de moi pour me dire que mon corps était beau tel quel. Cela a été un long parcours avant d’arriver à cette relation de bienveillance, d’amour et de respect que j’ai aujourd’hui avec mon corps. »
L’été et le « Summer Body »
Le Summer Body, une idéologie morphologique qui apparaît sur le web ou dans les magazines de mode dès le mois de janvier en vue de la saison estivale, propose comme objectif d’avoir un corps esthétique et athlétique à exhiber fièrement durant l’été. Cette notion prend la forme d’un challenge, d’une épreuve qu’il faut être prêt à affronter. En somme, «le Summer Body c’est faire passer au deuxième plan tout le fun de l’été ! », s’exclame Amal. La jeune entrepreneuse pointe d’ailleurs du doigt ce concept : « C’est un mouvement très dangereux car il fait appel à la perte de poids ou au changement physique très rapide, ce qui n’est pas optimal. Cela peut ouvrir la porte à des problèmes de santé tels que les troubles du comportement alimentaire et cela nourrit cette idée que les gens ont un avis à donner sur notre corps. »
Le Body Positive, est-ce uniquement pour les femmes ?
À cette question, Amal répond : « Bien sûr que non ! » La culture de la diète et de la maigreur n’est effectivement pas réservée qu’aux femmes. Les hommes en sont aussi victimes, mais différemment et de manière plus silencieuse. Amal explique que la société va aussi « rendre glamour toutes sortes de caractéristiques chez les hommes qui ne seront pas perçus comme charismatiques chez les femmes. » Par exemple, le petit ventre d’un homme sera toujours mieux perçu que celui d’une femme. Toutefois, les troubles du comportement alimentaire ne font pas de sélection et touchent également beaucoup d’hommes.
Un avenir sans normes de beauté
Avec le retour de la mode minceur notamment sur le réseau social TikTok et le hashtag Y2K, abréviation pour Year 2000, faut-il s’inquiéter d’un retour vers le ultra skinny ? Ce n’est pas une question qui préoccupe Amal Tahir. Elle voit même ce retour de mode d’un bon œil : « Il y a quelques années, la mode était au skinny, puis les formes ont été valorisées. Dans les deux cas, des morphologies ont été laissées de côté, rendant les femmes mal à l’aise avec leur corps. Aujourd’hui, avec ce retour de l’héroïne chic à la Kate Moss, les skinnies sont à nouveau à la mode, sans pour autant prendre le dessus sur la mode des formes. »
Elle ajoute : « Dans mon idéal, il n’y a pas de normes de beauté. J’ai l’impression qu’aujourd’hui cela a beaucoup évolué et que chacun arrive à trouver sa place. Toutefois, des évolutions sont encore à faire au niveau des représentations des femmes rondes tant dans la mode qu’au cinéma, dans la musique ou au théâtre. J’espère qu’un jour les normes de beauté seront abolies et qu’on comprendra que chaque personne a un corps qui diffère des autres. »
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