« 286 ans seraient nécessaires pour se débarrasser des lois discriminatoires et combler le fossé existant entre les femmes et les hommes »
màd
Femmes

« 286 ans seraient nécessaires pour se débarrasser des lois discriminatoires et combler le fossé existant entre les femmes et les hommes »

31.08.2023
par Maévane Mas

Selon le rapport d’ONU Femmes intitulé « Paths to Equal : Twin indices on women’s empowerment and gender equality » publié en juillet 2023, aucun pays n’a atteint la parité totale entre les sexes et moins de 1 % des femmes et des filles vivent dans un pays où l’autonomisation des femmes est élevée et où l’écart entre les sexes est faible. Les femmes restent désavantagées, avec notamment des salaires inférieurs à ceux des hommes, tout en assumant une part disproportionnée du travail non rémunéré à la maison.

Les missions permanentes et les agences des Nations unies ont formé un grand NO au Palais des Nations pour montrer leur engagement à mettre fin à la violence contre les femmes et les filles en novembre 2021 lors de la campagne «16 of Activism».

Malgré les efforts déployés par les femmes du monde entier, après la pandémie de Covid, les indicateurs relatifs aux femmes et aux filles continuent d’accuser un retard. Objectif vers la parité, où en sommes-nous aujourd’hui ? Retour sur la question avec Adriana Quiñones, responsable des droits de l’homme et du développement et directrice adjointe du bureau de l’ONU Femmes à Genève.

ONU Femmes et ses objectifs

Créée en 2010 pour accélérer les progrès dans la satisfaction des besoins des femmes dans le monde, cette organisation est aujourd’hui présente dans près de 90 pays. ONU Femmes lutte pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes. « Nous apportons un soutien international et travaillons à l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Nous veillons également à ce qu’elles aient accès à la justice. Trop de crimes commis contre les femmes et les filles sont ignorés ou ne font pas l’objet d’enquêtes et de sanctions adéquates », explique la directrice adjointe du bureau d’ONU Femmes à Genève.

Les droits des femmes, un état des lieux

Dans son rapport sur l’égalité entre les femmes et les hommes de juillet 2022, le Forum économique mondial annonçait que dans un contexte de crises multiples, d’augmentation du coût de la vie, de pandémie, d’urgence climatique et de conflits d’ampleur, les progrès vers la parité étaient au point mort.

Dans son rapport de 2022, le Forum économique mondial classe dans le top 4 des pays les plus proches de la parité : l’Islande, la Finlande, la Norvège et la Nouvelle-Zélande.

Adriana Quiñones partage cet avis : « Lorsque nous examinons des indicateurs essentiels tels que la participation politique des femmes, la violence à l’égard des femmes ou même l’émancipation économique des femmes, nous constatons que nous avons effectivement reculé dans tous les indicateurs. La violence domestique a fortement augmenté pendant la pandémie de Covid-19, même dans des pays comme l’Espagne, la France et l’Italie. Selon une étude d’ONU Femmes, plus d’une femme et d’une fille sur dix âgées de 15 à 49 ans ont été victimes de violences basées sur le genre au cours de l’année écoulée. En outre, le dernier rapport d’ONU Femmes sur le fémicide, publié conjointement avec l’ONUDC en novembre 2022, indique qu’en 2021, environ 45 000 femmes et filles dans le monde ont été tuées par leur partenaire intime ou d’autres membres de la famille. »
Elle ajoute: « Il faudrait 286 ans aujourd’hui pour se débarrasser enfin des lois discriminatoires et combler le fossé existant entre les femmes et les hommes. Nous ne devrions pas considérer les droits des femmes comme acquis et nous devons nous efforcer de les améliorer. Nous sommes dans une situation où nous avons perdu beaucoup de terrain et nous devons le regagner. »

Aller de l’avant

Le plan stratégique d’ONU Femmes comprend des objectifs clés pour renverser la situation. Il s’agit principalement de promouvoir la participation politique et économique des femmes. Il est bien établi que lorsque les femmes occupent des postes de décision au sein des institutions, celles-ci tendent à être plus inclusives et plus durables.« Il est clair que les pays dotés d’un mouvement féministe fort et d’une organisation sociale où les femmes sont présentes à la table des négociations sont ceux qui ont le mieux réagi à la crise du Covid-19 », confirme Adriana Quiñones. Les données de l’étude « Women in politics : 2023 » de l’ONU Femmes et de l’Union interparlementaire (UIP) montrent que les femmes sont sous-représentées à tous les niveaux de décision dans le monde. Mais que lorsqu’elles sont à la table des négociations, leurs intérêts et leurs préoccupations sont représentés et entendus.

La responsable des droits de l’homme et du développement du bureau d’ONU Femmes à Genève, Adriana Quinones, et la chef de la délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, Lotte Knudsen, à la Place des Nations en novembre 2021 pendant la campagne des 16 jours d’activisme
(25 novembre-10 décembre).

L’émancipation économique des femmes est également un élément clé de l’égalité, de l’éducation et même de la croissance économique. Adriana Quiñones explique : « Il est essentiel d’investir dans la participation économique des femmes, car lorsqu’elles ont leur propre revenu, les résultats pour la santé éducative des enfants augmentent. De plus, si les femmes pouvaient subvenir davantage à leurs besoins et participer au marché libéral, le PIB du pays augmenterait d’au moins 25%. Les femmes seront également plus enclines à quitter la relation en cas de violence domestique ».

Garder espoir

Dans son rapport de 2022, le Forum économique mondial classe dans le top 4 des pays les plus proches de la parité : l’Islande, la Finlande, la Norvège et la Nouvelle-Zélande. Selon Adriana Quiñones, leur position est due à leur pourcentage élevé de femmes parlementaires, souvent proche des 50%. Nombre de ces pays ont en effet récemment été dirigés par des femmes ou ont mis en œuvre des politiques d’égalité des sexes qui s’attaquent à l’inégalité structurelle dans différents domaines. Il s’agit également de pays qui se sont engagés sur la voie de la parité depuis plusieurs décennies. Les résultats de ces dispositions peuvent donc être observés aujourd’hui et expliquer le classement de ces pays.

Que nous réserve l’avenir ?

La plateforme d’action de Pékin, qui vise l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes partout dans le monde, fêtera son 30e anniversaire en 2024. Cet événement nous permettra d’observer les progrès réalisés au cours des trois dernières décennies. Selon Adriana Quiñones, il s’agit d’une excellente occasion de regagner le terrain perdu ces dernières années : « Le 30e anniversaire de la Conférence de Pékin ouvre de nouvelles voies pour se rassembler, réaffirmer notre engagement, raviver notre volonté politique et mobiliser l’opinion publique. Cette alliance permettra à tous de travailler dans le même sens, celui de l’égalité, mais aussi de faire en sorte que notre gouvernement rende compte de son engagement. »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Article Précédent
Article Suivant