Rudolf Pfander est responsable de l’ensemble du salon Swissbau, qui se tient tous les deux ans à Bâle. Tous les acteurs impliqués dans la chaîne de valeur du secteur de la construction s’y réunissent. Le directeur du salon explique ce qui fait l’originalité de Swissbau et comment il imagine la ville de demain.
Rudolf Pfander, quel est l’objectif de Swissbau ?
Swissbau est un miroir du secteur de la construction. Nous invitons de nombreuses entreprises à participer au salon, parmi lesquelles se trouvent des partenaires de longue date. Notre objectif est d’offrir une plateforme d’échange et de collaboration interdisciplinaire. Avec nos partenaires, nous échangeons sur des thèmes passionnants qui font bouger le secteur de la construction et de l’immobilier. Des experts de haut niveau issus du monde de l’économie, de la science, de la politique et de l’éducation encouragent le débat sur ces sujets d’actualité.
Nous avons créé deux plateformes pour cet échange : Swissbau Lab et Swissbau Focus. Swissbau Focus est une plate-forme dédiée aux événements lors desquels des thèmes variés liés au secteur de la construction sont discutés. Les personnes intéressées peuvent y vivre de près le dialogue interdisciplinaire. Le Swissbau Lab s’intéresse à la pratique et à la mise en œuvre de nouvelles technologies et à la fabrication de prototypes. Là aussi, une discussion interdisciplinaire a lieu, qui, contrairement à Swissbau Focus, se concentre davantage sur la pratique.
Ce qui rend le salon Swissbau unique, c’est la discussion entre spécialistes. Nous réunissons tout le monde, de l’investisseur à l’artisan en passant par l’architecte. Ce n’est qu’ensemble que nous pourrons relever les défis actuels du secteur de la construction en Suisse.
Comment Swissbau se positionne-t-il par rapport à la promotion et à la présentation d’innovations pour le développement urbain de demain ?
L’échange interdisciplinaire permet aussi de discuter de ce à quoi doit ressembler la ville du futur. Nous contribuons à réunir les décideurs du secteur et à rassembler les compétences nécessaires. Tout le monde à un rôle à jouer, mais nous devons travailler ensemble – ce n’est qu’ainsi que nous pourrons apporter une contribution à l’avenir.
Dans quelle mesure Swissbau influence-t-il les tendances en matière d’urbanisme et d’architecture ?
C’est par exemple à l’occasion de Swissbau 2016 qu’a été créée la plateforme « Bauen digital Schweiz ». Les membres se sont alors réunis parce qu’ils ont tous reconnu qu’ils devaient faire avancer la planification et la construction numériques en Suisse. Depuis, l’association n’a cessé de croître. Cela montre que Swissbau offre une plateforme à tous les acteurs de la branche pour identifier les tendances et les suivre ensemble.
Tous les acteurs du secteur de la construction doivent réfléchir à la manière dont nous concevrons les villes à l’avenir.
Rudolf Pfander
Comment Swissbau contribue-t-il à la prise de conscience et à la mise en œuvre de pratiques durables dans le secteur de la construction ?
Le climat et l’économie circulaire sont deux de nos principaux thèmes. L’architecte allemand Thomas Rau est déjà intervenu chez nous. Il est considéré au niveau international comme une référence en matière de durabilité, de pénurie de ressources et d’utilisation des énergies renouvelables dans l’architecture. Rassembler les gens autour de thèmes importants est notre mission. C’est ainsi que nous inspirons les gens à faire bouger les choses. Le salon offre aux entreprises la possibilité de se montrer et de se faire connaître grâce à des innovations dans des thèmes d’actualité tels que la durabilité. Le public spécialisé vient à Swissbau pour s’informer sur les défis et les solutions de certains problèmes et, dans l’idéal, les adopter dans son propre environnement professionnel.
Le salon propose-t-il des programmes spéciaux qui traitent directement de la planification et de la conception des villes du futur ?
Tous les acteurs du secteur de la construction doivent réfléchir à la manière dont nous concevrons les villes à l’avenir. Avec une Suisse à 9 ou 10 millions d’habitants, de grands défis nous attendent. Le transfert de connaissances a lieu à Swissbau. Nous y parlons de bons exemples, échangeons des expériences pratiques et progressons ainsi ensemble.
Pouvez-vous citer un exemple de technologie révolutionnaire présentée à Swissbau et qui pourrait influencer la planification urbaine ?
Cette année, un pont en carbone était exposé au salon. Il mesurait 17 mètres de long et était constitué de CPC (Carbon Prestressed Concrete), c’est-à-dire de fines plaques de béton précontraintes par du carbone. Les ponts en CPC sont beaucoup plus légers que les ponts en béton pur et nécessitent beaucoup moins de matériaux lors de leur fabrication. Il s’agit d’une première mondiale qui pourrait marquer le début de la construction de villes durables.
L’institut de recherche de la ZHAW (architecture, design et génie civil) à propos du CPC :
« Dans les éléments de construction conventionnels en béton, l’armature en acier doit toujours être protégée de la corrosion due à l’eau, aux sels de déneigement ou à un environnement chimiquement agressif par une couche de béton extérieure. Cette couverture de béton a généralement une épaisseur de 35 à 55 mm et peut, au mieux, aider partiellement à supporter les charges – mais elle contribue de manière déterminante au poids et à l’aspect visuel des éléments de construction. L’utilisation du carbone offre ici de grands avantages : il ne se corrode pas, de sorte que la couverture de béton peut être réduite à un minimum absolu. Ces plaques de béton CPC nouvellement développées sont en tout point équivalentes aux constructions conventionnelles en termes de capacité de charge, et même supérieures en termes de consommation de ressources et de durabilité grâce à l’utilisation nettement réduite de matériaux. Les plaques ont été utilisées pour la première fois comme revêtement d’une passerelle et d’un pont de la nouvelle promenade le long des rives de la commune d’Unterägeri. Le projet a même conduit à la création d’une start-up. En octobre 2016, le pont de l’Eulach à Winterthour, entièrement construit en plaques CPC, a été inauguré. Des prototypes d’un système de ponts modulaires CPC avec une plaque CPC comme chaussée et une poutre en carbone ont été construits sur le lac de Zoug et à Turbenthal ».
Quelle vision poursuivez-vous avec Swissbau ?
Nous vivons dans un monde qui a tendance à se refermer sur lui-même. De nombreux pays ferment leurs frontières. Mais nous ne pouvons pas revenir sur la mondialisation. Au contraire, nous devons nous y atteler ensemble. Pour cela, il est important d’avoir de la compréhension pour les autres. Pour moi, l’économie circulaire est ainsi décisive et pour s’en rapprocher, nous devons construire autrement. Pour cela, tous les acteurs doivent penser ensemble en termes de cycles globaux à long terme et créer des solutions pour une utilisation intelligente des ressources. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons rester dans l’air du temps et faire la différence.
Comment souhaitez-vous que Swissbau évolue ?
Les principales associations sectorielles définissent la plupart du temps les thèmes les plus importants. Nous travaillons avec des acteurs qui regardent au-delà de la clôture de leur propre jardin et qui veulent chercher ensemble une solution. Finalement, nous devons changer le monde avec ceux qui le veulent aussi.
Travaillez-vous aussi avec la Suisse romande ?
Nous voulons à l’avenir impliquer encore plus la Suisse romande, par exemple par des traductions simultanées en français. La Suisse romande est très importante dans le secteur de la construction et mène de nombreux projets passionnants qui pourraient être encouragés par une collaboration. Pour surmonter le « Röstigraben », il faut de nouveaux outils et de nouvelles offres des deux côtés. Nous voulons à l’avenir accueillir encore mieux la Suisse romande à Bâle. Sur le site Internet francophone de Swissbau, il est possible de s’informer à tout moment sur les idées et les thèmes pertinents du secteur suisse de la construction. Un coup d’œil sur swissbau.ch vaut également la peine avant le prochain salon en janvier 2026.
Selon vous, quels sont les éléments clés d’un quartier où il fait bon vivre ?
À l’avenir, les villes seront de plus en plus denses. Nous devons donc d’autant plus nous préoccuper des espaces de détente et des espaces verts. J’aime beaucoup aller dans la nature. Il est essentiel que nous l’appréciions et que nous l’introduisions à nouveau davantage dans la ville. La « ville-éponge », dans laquelle un maximum d’eau de pluie est récupéré et stocké pour être réutilisé, est également un concept judicieux de l’urbanisme du futur. Mon quartier idéal, je ne l’imagine pas trop dense, avec suffisamment d’espaces libres pour tous, ainsi que des places animées et vertes.
Laisser un commentaire