Interview par Léa Stocky

Andreas Caminada: « J’aime les ingrédients simples, savoureux et qui viennent du jardin »

Découvrez l’univers et la cuisine du chef suisse.

Il y a vingt ans, le chef suisse désormais étoilé Andreas Caminada ouvrait son premier restaurant à Fürstenau, le Schloss Schauenstein. Créatif, passionné et bosseur, il a depuis su créer des espaces dans lesquels les plus gourmets peuvent venir et faire profiter leurs papilles, en toute simplicité.

Dans cette interview, le chef nous parle de son métier, mais nous donne aussi de précieux conseils culinaires pour apprécier au mieux l’automne et l’hiver qui arrivent.

Andreas Caminada

Andreas Caminada, comment décririez-vous vos plats ?

Mes plats sont vraiment bons ! Ils sont savoureux mais aussi très beaux. Ma cuisine est avant tout axée sur des produits frais et des combinaisons créatives, entre histoire, saveurs et émotions. Il s’agit de toucher les gens à un instant précis grâce à une identité reconnaissable. Ils reviennent car ils aiment la façon singulière dont nous cuisinons ou encore la façon dont nous assaisonnons ou présentons nos plats. L’expérience restaurant passe en effet par cette attention aux détails. Nous souhaitons que quelque chose se passe dans la bouche.

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

En tant que chef, on est entouré de nourriture tous les jours. Les sources d’inspiration sont donc multiples. Il y a le jardin et les différentes saisons qui offrent chacune d’elles leur lot d’aliments spécifiques. Avoir un jardin nous permet d’en prendre conscience et de pouvoir réellement mettre l’extérieur sur la table. L’été est fleuri et le printemps très vert, tandis qu’en automne et en hiver les couleurs commencent à s’assombrir. Avec mon équipe et particulièrement Marcel Skibba, chef cuisinier et copropriétaire du restaurant, nous faisons des brainstormings pour échanger des idées. Ce qui peut aider, c’est également de voir les assiettes et d’imaginer comment les habiller, et bien sûr le fait de passer du temps dehors et de voyager afin de voir ce qui se passe dans le monde des autres chefs.

Quel a été le plus grand défi de votre carrière jusqu’à présent et comment l’avez-vous relevé ?

Le plus gros défi a été d’ouvrir le restaurant. Il a fallu franchir le pas, prendre ce risque et survivre les premières années qui ont été très difficiles. Nous avons dû travailler dur. Finalement, nous sommes aujourd’hui très contents d’avoir une super équipe et une bonne culture d’entreprise. Nous essayons de garder nos employés le plus longtemps possible, de leur donner la possibilité d’évoluer grâce à une atmosphère familiale et tournée vers les autres.

Comment vous tenez-vous au courant des nouvelles tendances et techniques culinaires ?

Nous ne voulons pas être un restaurant tendance. En revanche, il est important de rester attentifs aux changements dans la société et de ce dont elle a besoin. En 2016, nous avons donc décidé de consacrer plus d’efforts à notre jardin composé de beaucoup de fleurs, d’herbes, de fruits et de légumes. Après le Covid, on a assisté à une volonté d’un retour aux sources et d’une cuisine plus légère, presque à la façon dont nos grands-parents cuisinaient. Il faut donc réussir à rester fidèle à sa cuisine et à ce qu’on veut transmettre, tout en réussissant à anticiper la suite pour réussir à s’adapter. Nous essayons par exemple de ne jamais cesser de surprendre nos visiteurs, tout spécialement celles et ceux qui reviennent souvent.

Quel est l’ingrédient avec lequel vous préférez travailler et pourquoi ?

Nous avons dans notre jardin des épinards de Malabar que j’apprécie beaucoup en raison de leur texture croustillante. Nous avons également de l’aneth, du poivre, des melons, de la pastèque, des mirabelles etc. Je n’ai pas besoin de produits de luxe, j’aime les ingrédients simples, savoureux et qui viennent du jardin.

Quels sont vos ingrédients ou aliments préférés en automne et en hiver ?

En hiver, j’aime cuisiner le cicorino rosso, l’artichaut, la citrouille, le topinambour et les légumes racines qui sont selon moi sous-estimés. C’est en travaillant avec des produits simples que l’on peut laisser libre court à sa créativité. Si l’on prend les carottes par exemple, il y a tant de variétés et de possibilités.

Quel est votre plat préféré ?

J’aime les plats de pâtes et les escalopes de veau.

Comment voyez-vous l’évolution de la cuisine et de la gastronomie au cours des prochaines années ?

Cela va devenir de plus en plus difficile d’embaucher les bonnes personnes. Au niveau de la gastronomie, nous serons amenés à cuisiner davantage de légumes et d’ingrédients à base de plantes. Je pense aussi qu’on se dirige vers plus de restaurants spécialisés dans tels ou tels types de plats. Par exemple, les restaurants qui proposent de la gastronomie française traditionnelle survivront car ils trouveront toujours leur public. Les possibilités sont tellement grandes que les restaurateurs n’ont pas besoin de savoir cuisiner de tout. En revanche, ils ont tout à gagner en devenant de véritables maîtres dans leur domaine.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite devenir chef cuisinier ?

Lance-toi ! Au début, cela peut-être très dur, mais les points positifs ne sont pas négligeables. Même les points négatifs, tels que les pauses en plein milieu d’après-midi, peuvent devenir un grand plus. Finalement, l’industrie culinaire dans le monde est assez petite. Une fois chef, on peut donc facilement voyager et on trouvera toujours du travail. On est entouré de personnes heureuses. Ce travail est avant tout incroyable car il réunit des gens de différentes cultures et d’horizons variés. C’est comme une grande famille.

Voir les sourires sur le visage des gens est très gratifiant : on a une réponse directe à notre travail. C’est quelque chose d’assez unique.

Quelle est la chose la plus importante que vous avez apprise dans la cuisine et que vous aimeriez transmettre aux autres ?

J’ai commencé avec quatre employés et j’en ai aujourd’hui plus de 100 en comptant tous les restaurants. Gérer du personnel n’est pas évident, il faut savoir où l’on veut aller, mettre en place des objectifs et motiver ses équipes. Je suis vite devenu accro à ce travail vers la perfection et à cette attention portée aux détails, réfléchissant constamment à ce qui pourrait être amélioré. J’en apprends tous les jours. Ouvrir un restaurant n’est que le début de l’histoire. Voir les sourires sur le visage des gens est très gratifiant : on a une réponse directe à notre travail. C’est quelque chose d’assez unique.

Quels sont vos futurs projets en tant que chef ?

Nous allons ouvrir un restaurant IGNIV à Andermatt en décembre. Nous avons également produit une série sur Amazon Prime qui sortira en janvier, Dinner Club. Nous sommes aussi toujours en train de développer notre fondation créée en 2015 afin de soutenir de jeunes talents, la fondation Uccelin.

Recette Cicorino Rosso

Recette Cicorino Rosso

Épices Panch Phoron
100g de fenugrec
40g de moutarde noire
30g de nigelle
20g de cumin
50g de graines de fenouil

Bouillon de légumes
40g d’épices Panch Phoron
300g de jus de citron
200g de sauce Mizkan
200g de jus de betterave
100g d’huile de colza

Salade
4pc de cicorino rosso
200g de coulis de légumes
Sel, poivre, vinaigre de cidre, réduction de pomme et ciboulette

Couper le cicorino rosso en deux et le mettre sous vide avec le jus de cuisson. Cuire à la vapeur à 85 degrés pendant 20 minutes et refroidir ensuite. Ouvrir le sachet et le couper en petits morceaux de 1 cm. Mariner ensuite le cicorino rosso avec du sel, du poivre, du sucre, du vinaigre de cidre, de la réduction de pomme et de la ciboulette et assaisonner.

Base de radicchio
4kg de radicchio
1.25l de vinaigre balsamique blanc
500g de sucre
2.5l d’eau

Commencer par faire caraméliser le sucre dans la poêle, puis ajouter le radicchio coupé en petits morceaux et bien le faire suer. Mouiller ensuite avec le vinaigre balsamique et laisser réduire. Dès que le vinaigre balsamique a entièrement réduit, verser l’eau et laisser mijoter pendant plusieurs heures au point d’ébullition. Ensuite, égoutter le tout et passer le jus (la base) à travers un tamis pointu.

Sauce au radicchio
500g de base de radicchio
Vinaigre de cidre, verjus, sel, sucre, réduction de jus de pomme, xanthane

Assaisonner la base de radicchio avec le vinaigre de pomme, le verjus, le sel, le sucre et la réduction de jus de pomme. Lier ensuite avec de la gomme xanthane.

Glace au radicchio
250g de base de radicchio
125g de jus de pomme
15g de sucre inverti
12g de pectine rose
25g de sirop de glucose
Sel, poivre, vinaigre de cidre, vinaigre balsamique blanc

Mélanger la base de radicchio avec le jus de pomme, le sucre inverti, la pectine rose et le glucose en remuant constamment.

Feuille de radicchio
4 feuilles de radicchio
500g de jus de pomme
500g d’eau
150g de vinaigre balsamique blanc
5g de sel
15g de sucre

Découper des cercles de 8cm dans les feuilles et les faire mariner dans le reste des ingrédients.

Salade de poires
1pc de poires fraîches (coupées en petits dés de 3mm)
1pc de topinambour (coupé en petits dés 3mm)
Réduction de jus de pomme, sel, poivre, huile d’olive et vinaigre de cidre.

Faire mariner les poires et les topinambours coupés avec la réduction de jus de pomme, le sel, le poivre, l’huile d’olive et le vinaigre de cidre.

Dressage
Huile au piment

Placer la salade de cicorino rosso sur l’assiette et la recouvrir d’une feuille de radicchio. Déposer trois petits tas de salade de poires sur la feuille. Disposer une quenelle de glace à côté. Disposer la sauce au radicchio et l’huile pimentée tout autour.

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13.10.2024
par Léa Stocky
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