Dr Philippe Gnaegi
directeur de Pro Familia Suisse
La Suisse accuse un certain retard en matière de politique familiale, bien que plusieurs évolutions sociales rendent cette question plus pressante que jamais. Face au besoin des femmes de conserver leur place sur le marché du travail, à la pénurie de personnel qualifié, au vieillissement de la population, aux contraintes financières qui touchent de nombreux foyers et au taux de natalité insuffisant, il devient impératif de repenser notre approche.
Avec 80 % des femmes actives dans le monde du travail et un niveau d’éducation comparable à celui des hommes, favoriser la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale apparaît naturel. Pour y parvenir, il est essentiel d’augmenter le nombre de places disponibles dans les structures d’accueil pour enfants et d’en réduire les coûts. Ces investissements se révèlent rentables : en stimulant le taux d’activité des mères, ils génèrent des recettes fiscales qui surpassent les coûts initiaux des infrastructures d’accueil.
Cependant, la conciliation entre vie professionnelle et familiale ne se limite pas aux structures d’accueil pour enfants. Elle touche également le soutien aux proches dépendants, une responsabilité souvent assurée par des personnes toujours en activité. Certaines entreprises ont commencé à adapter leurs pratiques pour mieux soutenir les proches aidants dans cet équilibre complexe.
Parallèlement, une politique intergénérationnelle renforcée s’impose. Aujourd’hui, jusqu’à quatre générations cohabitent, et nos aînés, disposés à partager leur expérience, pourraient contribuer activement à la société si les structures le permettaient.
Une politique durable et inclusive, centrée sur le bien-être de toutes les familles. – Dr Philippe Gnaegi, directeur de Pro Familia Suisse
La pauvreté reste également un défi dans notre pays. Bien que la Suisse affiche un haut niveau de vie, certaines familles peinent à subvenir à des besoins imprévus, comme les soins dentaires de leurs enfants. Plusieurs cantons, tels que Vaud et Genève ou récemment Fribourg, ont pris les devants en introduisant des prestations complémentaires pour familles en difficulté, une mesure qui s’ajoute aux allocations familiales et aux réductions de primes d’assurance-maladie.
Outre ces mesures, il est crucial de renforcer les politiques de soutien aux familles pour inclure également les enfants ayant des besoins spécifiques, notamment ceux atteints de handicap. L’amélioration de l’intégration dès la petite enfance doit être au cœur des priorités, afin de garantir à chaque enfant un accès équitable aux structures de garde et aux services éducatifs.
Il est ainsi temps d’investir dans une politique familiale ambitieuse qui ne vient pas uniquement répondre aux défis actuels mais qui anticipe aussi ceux de demain. Une politique durable et inclusive, centrée sur le bien-être de toutes les familles, serait non seulement bénéfique sur le plan social, mais également rentable pour notre économie. En effet, en favorisant l’inclusion et la stabilité des familles, nous renforçons la cohésion sociale et la croissance économique de demain.
Texte Dr Philippe Gnaegi, directeur de Pro Familia Suisse
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