Un objectif ambitieux pour le climat
La majorité des quelques 80 000 PME de Suisse ont des coûts énergétiques annuels qui varient entre 20 000 et 300 000 francs par an, avec des situations très différentes d’un secteur à l’autre.
Ainsi, pour celles qui consomment beaucoup d’électricité (fours de cuisson, etc.) et qui étaient sur le marché libre de l’électricité, la multiplication début 2023 de leur facture d’électricité par un facteur 5 ou 10 a impacté les coûts d’exploitation de façon considérable. Il en est de même pour les PME qui consomment beaucoup de chaleur de process (maraîchage, etc.) et qui ont été impactées par la hausse du prix du gaz, du mazout ou de la chaleur à distance.
À la dimension économique de l’énergie s’ajoute la dimension environnementale qui motive elle aussi les entreprises à mieux maîtriser leur consommation d’énergie et les impacts associés. Les questions énergétiques et climatiques sont étroitement liées et doivent être traitées simultanément.
Ainsi, la Suisse vient d’adopter ce 18 juin en votation populaire une nouvelle loi sur le climat qui fixe un objectif ambitieux de neutralité carbone nette d’ici 2050. Cet objectif est à la hauteur des efforts à faire pour limiter l’ampleur du réchauffement climatique et il implique des changements à tous les niveaux.
Tous les acteurs économiques du pays, y compris les PME, sont ainsi appelées à réduire drastiquement leur consommation d’énergie et leurs émissions de CO2. À l’instar du canton de Genève, les autres cantons édicteront prochainement de nouvelles obligations d’isolation des bâtiments les moins performants et interdiront, sauf exception, le remplacement des chaudières à gaz ou à mazout par des chaudières fossiles. Il faudra innover ! Combiner mesures d’optimisation énergétique, isolation thermique, récupération de chaleur de process, recours à des pompes à chaleur et à l’énergie solaire etc. La Confédération prévoit ainsi 3.2 milliards d’aides financières nouvelles dans les 10 ans pour accompagner ce changement.
- Pour innover durablement et efficacement, il faut suivre une logique itérative systématique :
- Faire un état des lieux et identifier les potentiels d’amélioration (mesurer et auditer)
- Engager les actions d’optimisation encore non exploitées
- Planifier et réaliser les investissements pour améliorer l’enveloppe thermique et changer les techniques du bâtiment, en tirant parti des subventions,
- Contrôler l’efficacité des mesures engagées, et poursuivre le suivi et l’optimisation des consommations
La direction d’entreprise doit soutenir la démarche en commençant par désigner un-e responsable du management de l’énergie et en lui donnant les moyens d’agir : du temps, un budget pour poser des compteurs / télé-relevés et engager des audits, puis un budget le moment venu pour mettre en œuvre un plan d’actions.
Mesurer et auditer
La mesure et le suivi des consommations d’énergie et des émissions de CO2 est le socle de toute stratégie d’économie d’énergie et de décarbonation.
Tous les acteurs économiques du pays, y compris les PME, sont appelées à réduire drastiquement leur consommation d’énergie et leurs émissions de CO2.
Force est de constater que bien souvent les seuls compteurs en place sont les compteurs des fournisseurs pour la facturation de l’énergie livrée, alors qu’il faut d’abord savoir où l’énergie est principalement consommée avant de savoir où agir en priorité.
Tout mesurer n’a pas de sens et il faut se concentrer sur le suivi des usages énergétiques significatifs (UES selon la terminologie de la norme ISO 50001 relative au management de l’énergie), qui remplissent tout ou partie des critères suivants : importance des consommations (20 % des activités concourent souvent à 80 % des consommations totales d’énergie), importance du process, des coûts, du potentiel d’économie et du bilan carbone. Dans le contexte actuel de risque de pénurie en électricité ou en gaz peut également être considéré le critère du risque commercial pour l’entreprise en cas d’interruption de la fourniture.
Ces UES doivent faire l’objet d’une analyse pour déterminer comment en réduire l’importance par des mesures d’optimisation. Les installations sont instrumentées pour pouvoir relever les paramètres de fonctionnement qui impactent significativement les consommations d’énergie : températures, débits d’air et température de pulsion dans le cas d’installations de ventilation, pression dans le cas de compresseurs d’air, nombre d’heures d’enclenchement etc.
Sur cette base, des experts énergéticiens peuvent poser un diagnostic sur l’enveloppe thermique du bâtiment et les installations, d’une part sur la vétusté des éléments pour planifier quand ces derniers devront être remplacés, d’autre part sur le niveau de performance actuel et sur les performances qui pourraient être atteintes par une optimisation de leur exploitation ou par leur remplacement. Chaque remplacement, que ce soit de fenêtres, de chaudières, de compresseurs, d’éclairage etc. doit être considéré comme une opportunité d’innover et de réduire significativement les empreintes énergétique et carbone de l’entreprise, en association avec par exemple des investissements dans l’autoproduction solaire ou la mise en place de systèmes de récupération de chaleur.
Pour aider les PME à mettre le pied à l’étrier, un programme spécial, appelé PEIK, a été spécialement développé à leur attention par la Confédération.
Les subventions (fédérales et parfois cantonales) couvrent une partie des coûts d’audit et 50 % des coûts d’accompagnement (jusqu’à 10 jours) pour la mise en œuvre des mesures.
Optimiser
L’audit mettra en évidence des mesures permettant, par expérience, de réduire en moyenne 15 % des consommations d’énergie sans investissement en capital.
Le recours à un expert agréé PEIK vous fait profiter des subventions fédérales mais également d’une démarche systématique pour ne rater aucun des potentiels d’optimisation (p.ex. réduction nocturne ou pendant les weekends, ajustement de la courbe de chauffe, pose d’un variateur de fréquence pour les pompes de circulation, ajustement de pression du compresseur d’air).
Investir / Innover
Devoir remplacer une chaîne de production, intervenir sur un défaut d’étanchéité du bâtiment, mettre en conformité le bâtiment aux normes de sécurité incendie ou remplacer une chaudière en fin de vie requièrent des investissements qui sont des opportunités pour réduire drastiquement les consommations d’énergie avec de nombreux co-bénéfices.
Ici encore, l’audit permet de classifier les investissements en fonction de leur coût et rentabilité en tenant compte des subventions du Programme Bâtiments ou d’autres programmes (cf. www.francsenergie.ch)
En ce qui concerne la fourniture de chaleur, de nombreuses options permettent de s’affranchir des chaudières fossiles : pompes à chaleur (couplées le cas échéant à des installations photovoltaïques), installations de cogénération au gaz ou au bois.
Les entreprises doivent établir une stratégie de décarbonation, comparer les variantes d’un point de vue technique, économique et durable à long terme. La technique seule ne suffit pas : la connaissance du cadre-légal et des programmes de soutien, l’analyse des conditions contractuelles, l’évaluation du partage des risques et des incitations entre les parties prenantes sont indispensables au succès des projets innovants.
Afin d’assurer les économies d’énergie après investissement, l’impact des mesures et travaux d’optimisation est mesuré en corrigeant les facteurs externes. Le contrat de performance énergétique est un outil intéressant pour la mise en place des mesures puisqu’il inclut une garantie contractuelle d’économies d’énergie après travaux. Si les économies sont plus faibles qu’escomptées, l’entreprise en charge des travaux paye la différence.
Les grandes entreprises se verront obliger dès 2024 de produire des rapports climatiques ou des rapports de durabilité qui doivent décrire les actions qu’elles engagent pour décarboner leurs activités mais également les mesures prises envers leurs fournisseurs pour que ces derniers décarbonent également leurs activités.
La démarche présentée plus haut est un cycle vertueux garantissant un processus d’amélioration continue à long terme. Les ruptures organisationnelles et technologiques sont quasi un passage obligé pour réussir à décarboner ses activités. Cette exigence a un coût mais elle n’a pas de prix pour donner aux entreprises la capacité de résilience et des gages de durabilité aux clients B2B qui sont aussi dans un processus de décarbonation et qui posent cette exigence à leurs fournisseurs.
Plus d'infos :
c/o Amstein+Walthert
Genève SA
AWGEInfo@amstein-walthert.ch
Amstein+Walthert est l’un des plus grands bureaux de conseil et d’ingénierie dans le domaine du bâtiment en Suisse, actif dans l’expertise, l’audit, la planification, la réalisation, la labellisation et le controlling énergétique de bâtiments durables et énergétiquement performants. Il déploie également ses activités en France.
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