former les professionnels pour réussir la transition énergétique
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Développement durable

Former les professionnels pour réussir la transition énergétique

15.11.2023
par Maévane Mas

Notre économie actuelle s’est développée sur la base d’une énergie fossile abondante et bon marché aux effets délétères pour la planète. Dès lors, pour rendre notre développement durable, ce qui passe notamment par la neutralité carbone d’ici 2050, nos pratiques sont complètement à revoir. Pour y parvenir, adapter la formation à ces enjeux est impératif. 

Olivier Epelly
Responsable du Conseil en stratégie énergétique et durabilité chez Amstein + Walthert

C’est en effet ce qu’explique Olivier Epelly, responsable du Conseil en stratégie énergétique et durabilité chez Amstein + Walthert et codirecteur du CAS en stratégie et management des énergies à l’Université de Genève.

Olivier Epelly, quel est le rôle de la formation dans le développement d’un monde plus respectueux du climat ?

Développer la formation est essentiel pour réussir la transition énergétique, car il faut des professionnels à même de mettre en œuvre de nouvelles solutions. Dans le domaine de la construction, par exemple, les élèves en architecture ou génie civil suivent déjà des cours sur la construction durable dans leur formation de base. Ces connaissances nouvelles doivent aussi être transmises aux professionnels déjà en activité qui ont été formés à l’ancienne et qui sont bien plus nombreux que les nouvelles générations. C’est là le rôle de la formation continue. 

À l’échelle des entreprises, la réduction des consommations d’énergie et le remplacement des énergies fossiles par des énergies renouvelables n’est pas qu’une affaire de spécialistes. L’Université de Genève propose depuis plusieurs années une formation continue sur six mois en stratégie et management des énergies qui forme des gestionnaires de l’énergie pour mettre en place notamment les processus d’analyse des consommations, d’audit et de planification des actions de performance, en plaçant l’efficacité énergétique au cœur des processus d’innovation des entreprises.

Comment la formation suisse s’adapte-elle aux nouvelles thématiques de développement durable ?

Dans le domaine de la construction, il y a une mise à jour permanente de l’offre de formation continue dans le domaine technique (chauffage, production photovoltaïque, matériaux d’isolation, etc.), en lien avec le renforcement des exigences légales ou normatives et en lien avec l’évolution des matériaux et des technologies.

D’autre part, des labels de construction durable tels que SNBS-Bâtiment se sont développés en compléments de labels qui ne concernaient au départ que l’énergie (par exemple Minergie-Bâtiment). Ces nouveaux labels prennent en compte les thématiques environnementales, sociales et économiques du développement durable. 

Il va également falloir construire et rénover en adaptant les bâtiments à des températures plus chaudes : comment assurer le confort en été sans recourir à une climatisation énergivore ? Des nouvelles formations commencent à apparaître sur ces thématiques. 

Dans quelles mesures la formation influence-t-elle l’innovation dans le domaine du développement durable ? 

La formation est primordiale pour transférer les connaissances nécessaires à l’innovation. Pour prendre l’exemple du bâtiment, il y a une innovation permanente au niveau des matériaux, que ce soit les matériaux d’isolation ou les vitrages. C’est vrai aussi au niveau des technologies avec l’électrification du chauffage et de la mobilité, le développement de l’autoproduction /  l’autoconsommation d’énergie et la gestion plus intelligente de l’offre et de la demande énergétique.

Vous êtes codirecteur du CAS Stratégie et management des énergies à l’Université de Genève. Pourquoi, selon vous, est-il essentiel de former des personnes au management de l’énergie ? 

Réduire d’un facteur 2 ou 3 sa consommation d’énergie et passer à 100 % d’énergie renouvelable n’est pas chose aisée pour les entreprises. Des changements en profondeur seront nécessaires et remettront en question la chaîne logistique, la chaîne de production, voire même le design des produits ou des services livrés par l’entreprise.

En effet, la consommation d’énergie est transversale et concerne toutes les activités d’une entreprise, raison pour laquelle elle n’est généralement pas gérée par une personne en particulier. L’absence de responsabilité sur cette question rend les changements très difficiles. Une personne en charge du management de l’énergie n’a pas de baguette magique, elle va devoir mettre en place les conditions pour qu’émergent des améliorations sur le long terme et de façon continue. En somme, le management de l’énergie est un nouveau métier appelé à un bel avenir et cette formation de l’Université de Genève comble un manque dans l’offre de formation.

L’organisation internationale de normalisation a bien identifié l’importance de la conduite du changement en adoptant la norme ISO 50001 qui place de facto l’énergie comme un facteur essentiel à manager et à intégrer dans tous les échelons de décision de l’entreprise. 

Pensez-vous que de nouvelles formations centrées sur le développement durable verront le jour ces prochaines années ?
Dans quels secteurs en particulier ? 

Le développement durable englobe toutes les dimensions de la durabilité et par conséquent tous les secteurs sont concernés. Il n’y a pas qu’une formation sur le développement durable mais plutôt des formations complémentaires pour les différents acteurs qui vont contribuer à la transformation de notre société vers une société plus durable. Le développement durable sera probablement intégré à tous les cursus de formation, qu’il s’agisse des sciences de l’ingénierie, des sciences de la vie, des sciences sociales ou encore du droit, puisque la transformation de notre société en une société plus durable remet en cause tout notre mode de vie. 

En ce qui concerne le secteur du bâtiment, l’enjeu essentiel est la rénovation car le parc bâti existant porte l’essentiel du bilan carbone des bâtiments en Suisse (env. 40 % des émissions de gaz à effet de serre en Suisse). Nous ne pouvons certainement pas nous permettre de tout démolir et reconstruire à neuf, il faut donc développer les compétences pour rénover durablement.

 

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