Pour apprécier le comportement durable d’une société, il faut non seulement que celle-ci publie l’impact de ses activités, mais aussi que cet impact soit évalué de la même façon dans le monde entier.
Traditionnellement, le seul but d’une entreprise était de maximiser ses profits pour ses actionnaires. Il est désormais admis qu’une entreprise doit se préoccuper de sa performance, des personnes et de la planète. Il faut qu’elle reste rentable, sinon ses bonnes pratiques ne dureront pas longtemps. Pour une entreprise, le fait de prendre soin de son personnel et de la planète qui fournit les ressources nécessaires à son activité sont aussi des facteurs de succès et de durabilité.
Alors que les standards comptables sont bien établis pour mesurer les résultats économiques d’une société, les standards relatifs aux aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) sont encore embryonnaires. Les plus avancés concernent le climat, vu le réchauffement de la planète. Pour apprécier le comportement durable d’une société, il faut que celle-ci publie l’impact de ses activités et que ce dernier soit évalué de la même façon dans le monde entier, afin de mener des comparaisons fiables.
En Suisse, le Conseil fédéral a prévu de rendre obligatoire pour les grandes banques, assurances et sociétés cotées la publication des effets de leurs activités sur le climat ou l’environnement et des risques financiers qui en découlent, selon un standard international. La première publication devra intervenir au plus tard en 2024 et portera sur les activités de 2023. Pour définir si un produit financier est durable, les banques ont besoin de ces informations en provenance des sociétés concernées.
Par ailleurs, il n’existe pas encore de méthode uniforme pour apprécier les données des sociétés. Swiss Sustainable Finance a recensé huit approches pour évaluer la durabilité d’un investissement. Par exemple, exclut-il certains secteurs d’activité (armes, énergies fossiles p.ex.), sélectionne-il les meilleurs acteurs d’un secteur (même s’ils polluent encore), ou les actionnaires s’engagent-ils pour améliorer les pratiques de l’entreprise? Cette variété explique que les notes de durabilité données par les agences de référence soient décorrélées entre elles.
L’écoblanchiment (ou «greenwashing») désigne des pratiques qui visent à tromper l’investisseur, en lui faisant croire qu’un produit est plus durable qu’il ne l’est. En réalité, ce terme est souvent employé lorsqu’un produit ne répond pas aux attentes d’un investisseur. Par exemple, un fonds qui tient compte des critères ESG ne contient pas forcément que des sociétés non polluantes ou des sociétés qui ont un impact positif sur le réchauffement de la planète. C’est pourquoi, pour éviter les déceptions, il faut expliquer quel aspect de la durabilité a été pris en compte et quelle stratégie est poursuivie.
On se rend de plus en plus compte que les sociétés ne sont pas «brunes» ou «vertes», mais qu’il existe au moins 50 nuances de vert. L’économie doit repenser son fonctionnement. Cela prendra du temps, car les nouvelles solutions ne sont de loin pas encore assez développées pour remplacer toute notre consommation actuelle. De nombreuses sociétés, pétrolières par exemple, sont en transition car elles se sont rendues compte qu’elles doivent s’adapter pour ne pas devenir obsolètes. Mais ne pas les soutenir dans cette transition reviendrait à repasser de la 5G à la 2G!
En Suisse, les principales sources d’émission de CO2 sont les bâtiments et les véhicules. Il faut donc dépenser des dizaines de milliards pour mieux isoler et chauffer les premiers et remplacer les seconds. Il faut aussi développer les sources d’énergie renouvelables. Les banques sont prêtes à financer ces projets, mais la volonté de les initier se trouve auprès des entreprises et des particuliers, c’est-à-dire de nous tous.
Texte Jan Langlo, Directeur de l’Association de Banques Privées Suisses
Laisser un commentaire