« Dans les médecines traditionnelles, les plantes sont toujours utilisées dans une approche holistique »
Les plus vieux écrits qu’on ait retrouvé sur les médecines traditionnelles datent de près de 5000 ans. Depuis toujours, les hommes ont su trouver dans les plantes de quoi se soigner. Aujourd’hui, les médecines traditionnelles font face à un regain d’intérêt.
François Chassagne est chargé de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement. Spécialisé dans l’étude des substances actives d’origine naturelle, il évalue l’efficacité des plantes sur certains modèles et certaines propriétés pharmacologiques. Dans cette interview, il explique en quoi l’étude scientifique des propriétés des plantes permet de garantir leur efficacité.
François Chassagne, qu’est-ce que l’ethnopharmacologie ?
Le mot est composé de « ethnos » qui veut dire peuple en grec, « pharmacon » qui vient de remède et « logos » qui signifie la science. Il s’agit donc de la science des remèdes du peuple. En d’autres termes, l’ethnopharmacologie est l’étude des médecines traditionnelles et de ses propriétés pharmacologiques.
D’où vient la pratique de cette discipline et est-elle répandue aujourd’hui ?
Le terme en lui-même ne date que des années 1970-1980 et a été utilisé pour décrire des pratiques déjà anciennes. En effet, cette discipline est née dès les premières explorations des Européens aux XVe et XVIe siècles, notamment en Amérique du Sud et en Afrique. Les explorateurs se sont rendu compte que les gens utilisaient des plantes pour se soigner et se nourrir. Certaines plantes les ont interpellés. L’exemple classique est celui du curare, à laquelle les Amérindiens recouraient pour immobiliser les animaux et les chasser plus facilement. Dans le même temps, les Européens ont également étudié leurs propres médecines traditionnelles. Petit à petit, du XVIe au XXe siècle, des botanistes ont essayé d’identifier précisément les plantes utilisées. En parallèle, des chimistes ont tenté d’analyser les molécules responsables de l’activité des plantes.
Quels sont les principes des médecines traditionnelles ?
Les médecines traditionnelles sont très diverses et se basent sur des données empiriques (c’est-à-dire tirées de l’observation), contrairement à la médecine conventionnelle qui est basée sur des preuves scientifiques, même si cette caractéristique n’est pas totalement vraie d’un point de vue anthropologique. Il s’agit de médecines très liées aux cultures, qu’elles soient écrites et documentées comme la médecine traditionnelle chinoise, ou bien orales.
En Europe et dans certaines régions de France, il existe encore des médecines traditionnelles transmises de génération en génération. On assiste également aujourd’hui à une forme de néo-traditionalisme qui pousse les gens à se réapproprier ces médecines en les étudiant dans des livres. En effet, les médecines traditionnelles sont présentes dans les pharmacopées européennes depuis très longtemps et ont constitué la source principale des médicaments. Le retour vers ces pratiques, qui s’opère depuis les années 1970, est dû au fait que beaucoup de gens sont déçus de la médecine conventionnelle qui oublie souvent de prendre en compte l’état général de la personne.
Qu’appelle-t-on plantes médicinales et comment peut-on les consommer ?
Il s’agit de plantes qui peuvent soigner de manière préventive ou curative. Leurs propriétés leur viennent du fait que, ne pouvant se déplacer car immobiles, elles ont dû développer tout un arsenal chimique de molécules qui leur permettent de se défendre. Leurs propriétés antibactériennes, antivirales, antiparasitaires, antifongiques, ou encore cardiotoniques sont ainsi un moyen de lutter contre les microbes, les insectes et les mammifères herbivores.
Les plantes, séchées ou fraîches, peuvent être consommées pures (mâchées puis recrachées), préparées en décoction, en infusion ou en macération alcoolique. En ce qui concerne les méthodes d’administration, on les prend le plus souvent par voie orale, mais on peut aussi les appliquer directement sur la peau. Avec les plantes aromatiques, on peut aussi faire des inhalations. En phytothérapie, c’est un peu différent car les plantes sont souvent déjà préparées sous forme de gélules, de comprimés ou de baumes.
Quels sont leurs bienfaits et quels types de maux peuvent-elles soigner ou prévenir ?
Un grand nombre de problèmes de santé ou de troubles sont soignables par les plantes médicinales, des systèmes nerveux et cardiaque au système digestif en passant par les problèmes de peau ou certaines maladies infectieuses.
Pour autant, les plantes médicinales ne sont pas la panacée. Elles ne peuvent pas guérir des maladies très graves, comme le cancer, qui nécessitent des médicaments dont l’efficacité a été prouvée scientifiquement.
Il faut bien comprendre qu’il faut faire attention aux plantes. Naturel ne veut pas dire inoffensif. Beaucoup de plantes autour de nous peuvent être toxiques, telles que l’if ou le laurier cerise. En fonction de notre état de santé et de la prise d’autres médicaments, il peut y avoir des contre-indications.
Ainsi, pour qu’elles continuent de prendre de l’importance, il faut effectuer des recherches scientifiques. Ce n’est que comme cela que l’on permettra au plus grand nombre d’utiliser les plantes médicinales de façon sûre et efficace.
De quelle manière peut-on s’aider des propriétés des plantes pour préparer son corps à l’arrivée de l’automne et rester en bonne santé ?
La préservation de l’état de santé ne dépend pas seulement de l’usage d’une plante. Il faut aussi s’alimenter de manière saine avec des fruits et des légumes, faire de l’exercice physique et bien s’hydrater. Dans les médecines traditionnelles, les plantes sont toujours utilisées dans une approche holistique : on prend en compte l’état émotionnel et spirituel de la personne pour pouvoir correctement la traiter. Je conseillerais donc aux personnes qui veulent se préparer à l’automne d’aller voir un expert en phytothérapie qui pourra leur prodiguer des conseils adaptés car nous sommes tous différents.
Plus d'informations
Si vous désirez en savoir plus sur les activités de François Chassagne, vous pouvez consulter son site internet :
https://www.ethnopharmacolab.fr/
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