side view of a doctor touching a pregnant man's belly, feeling the baby inside the tummy. medical pregnancy checkup concept
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Femmes Santé

Grossesse après 40 ans – Déconstruisons les mythes qui l’entourent

30.03.2024
par Léa Stocky

S’il est vrai que des complications sont plus susceptibles d’advenir, un accompagnement régulier et personnalisé permet de répondre au mieux aux besoins de la nouvelle famille en devenir. Dans cette interview, le Docteur Julien Chevreau, spécialiste en gynécologie et obstétrique à Hirslanden Clinique Cecil à Lausanne, nous éclaire sur la grossesse tardive et ses risques.

Dr Julien Chevreau,Spécialiste en gynécologie et obstétrique Hirslanden Clinique Cecil

Dr Julien Chevreau
Spécialiste en gynécologie et obstétrique Hirslanden Clinique Cecil

Dr Julien Chevreau, quels sont les risques associés à une grossesse après 40 ans ?

L’immense majorité des grossesses tardives se déroulent très bien. Cependant, il est vrai qu’il existe un léger surrisque de difficultés de conception et de problèmes lors du développement de l’embryon, puis du fœtus. Certaines pathologies maternelles, notamment au troisième trimestre, sont également plus courantes.

Comment l’âge affecte-t-il la fertilité et les chances de conception ?

La diminution de la fertilité survient en moyenne à partir de 32 ans, et s’accélère à partir de 37 ans. Cette diminution est due à la baisse de la qualité et de la quantité des ovocytes. Il est cependant difficile de donner un âge précis, car il y a souvent une différence entre l’âge chronologique et l’âge biologique.

On remarque que, plus on avance en âge, plus le risque de fausses couches très précoces est élevé. Cela s’explique par une augmentation des anomalies lors des divisions cellulaires initiales qui fabriquent l’embryon.

En quoi le risque de certaines pathologies ou anomalies génétiques est-il influencé par l’âge ?

Les anomalies génétiques augmentent avec l’âge, notamment celles liées au nombre de chromosomes. Pour la trisomie 21, il existe un test que nous effectuons au premier trimestre de la grossesse, et ce peu importe l’âge des femmes. En cas de risque augmenté, nous effectuons des examens diagnostiques qui se font par prises de sang.

Au niveau maternel, plus on avance en âge, plus on a des risques de développer des pathologies sous-jacentes. En cas d’hypertension préalable par exemple, il est possible d’observer un déséquilibre au cours de la grossesse.

Ensuite, pendant la grossesse tardive, on a plus de risques de développer certaines maladies comme la prééclampsie, qui est un problème d’hypertension dangereux pour le bébé et la maman. Pour la maman, cela peut être très grave et aller jusqu’à provoquer des convulsions. Au niveau de l’enfant, une prééclampsie peut entraîner la naissance de bébés de petits poids qui vont être plus fragiles.

L’âge rend également plus difficile la métabolisation du sucre. On appelle cela le diabète de grossesse. S’il disparaît souvent après la naissance de l’enfant, il peut avoir plusieurs conséquences. Parmi ces dernières, on pense notamment au fait que les bébés peuvent être plus gros, ce qui va entraîner une distension de l’utérus qui elle-même engendre des contractions et un risque d’accouchement prématuré. Ces bébés ont aussi tendance à être plus fragiles.

Les grossesses tardives nécessitent-­elles un suivi particulier, pendant la grossesse et après ?

Chaque grossesse est unique, c’est pourquoi le suivi doit être personnalisé. Cependant, pour les grossesses tardives, étant donné les risques accrus, on procède à un suivi plus assidu.

En cas de pathologies sous-jacentes, il faut programmer sa grossesse. Cela implique dans certains cas de la décaler de quelques mois pour être dans les meilleures conditions possibles. Par exemple, dans le cas d’un diabète préexistant à la grossesse, il faut que la conception soit faite à un moment où le diabète est bien équilibré. La patiente doit être capable de reconnaître les signes qui peuvent évoquer l’apparition d’une pathologie afin de pouvoir être réactif en cas de problèmes. Pour l’hypertension par exemple, les symptômes consistent en des céphalées, des acouphènes, des phosphènes (mouches devant les yeux) ou encore des œdèmes.

En post-partum, les risques de thromboembolie et de dépressions sont particulièrement surveillés.

Y a-t-il des modifications spécifiques à apporter à l’alimentation ou au mode de vie ?

Il faut bien comprendre que la grossesse n’est pas une maladie. Je dis souvent aux patientes qu’il faut vivre normalement. Cela veut dire que si l’on avait une activité physique avant d’être enceinte, il faut continuer à la pratiquer. Il est en revanche recommandé d’éviter certains sports pourvoyeurs de chutes tels que le ski, l’équitation ou encore certains mouvements de CrossFit. Cependant, la course à pied ou le yoga se pratiquent très bien pendant une grossesse. La natation est aussi idéale, car la contrainte du poids est nettement diminuée. De plus, maintenir une activité sportive est bénéfique tant sur le plan physique que moral. En post-partum, le sport permet de se défouler et de regagner confiance en soi, surtout quand le corps a changé. Avant de reprendre une activité physique après une grossesse, il est cependant important de s’assurer que le périnée le permette. Souvent, il faut commencer par une rééducation de ses muscles afin d’éviter des complications à long terme. Concernant les rapports sexuels, l’activité sexuelle doit rester la même qu’avant la grossesse.

De toute manière, la nature étant assez bien faite, si on en fait trop, on va le sentir par des tiraillements dans le ventre ou une sensation d’inconfort. Dans le cas de signes inhabituels, il ne faut pas hésiter à consulter pour s’assurer qu’il n’y ait pas de problèmes.
Les seuls réels changements à adopter pendant la grossesse se situent au niveau de l’alimentation. La viande doit toujours être bien cuite et les fruits bien lavés, les fromages doivent être pasteurisés. L’alcool et le tabac sont à éviter totalement car les neurones des embryons et du fœtus y sont très sensibles.

L’âge a-t-il une influence dans le choix entre l’accouchement vaginal ou l’accouchement par césarienne ?

Quand on lit la littérature médicale, on remarque que davantage de césariennes sont pratiquées après 40 ans. Cela est vrai, si l’on regarde globalement. Cependant, il faut faire attention à ce que disent les études. Il n’y a aucune raison de pratiquer une césarienne lorsque la grossesse se passe bien. Par contre, avec l’augmentation des risques de complications, on augmente le risque de césarienne. Après 40 ans, on a aussi plus recours à la procréation médicalement assistée qui est pourvoyeuse de grossesses multiples, qui elles-mêmes sont plus à risque de nécessiter une césarienne.

Quels sont les avantages ou les inconvénients de l’allaitement pour les grossesses tardives ?

Il y a peu de différence en fonction de l’âge. Les inconvénients principaux de l’allaitement sont la fatigue et la participation moindre du papa, même si ce dernier point peut être contrebalancé par le tire-lait. Les bénéfices sont le développement des anticorps du bébé contre certaines pathologies, un lien mère/enfant renforcé, une perte de poids plus rapide pour la maman et un coût diminué.

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