Il a brillé dans des compétitions telles que le triathlon et le semi-ironman. Aujourd’hui, l’athlète suisse Yannick Tachet, atteint d’une maladie dégénérative et incurable, l’amyotrophie spinale de type 3, se prépare à relever le défi complet de l’ironman 2024, démontrant ainsi que la force intérieure peut transcender les défis physiques. Dans cet entretien passionnant, il partage son caractère résilient, évoque son enfance marquée par la détermination, et dévoile ses ambitions futures de constamment se surpasser.
Yannick Tachet, quels sont les trois adjectifs qui vous décrivent le mieux ?
Je dirais combatif, ambitieux et têtu.
Que voulez-vous dire par têtu ?
Quand je me mets quelque chose en tête, je vais vouloir le faire et y aller jusqu’au bout, même si les personnes autour de moi s’y opposent. Ce trait de caractère m’a plutôt desservi quand j’étais petit, que ce soit à l’école ou avec l’autorité en général. Mais en grandissant, je réalise que c’est ma force. Ça m’a permis de ne pas me laisser abattre par la maladie que j’ai.
On vous a diagnostiqué votre maladie à 11 ans et demi, vous souvenez-vous de ce jour précis ?
Oui, je m’en souviens très bien. C’est très bizarre, mais quand on m’a diagnostiqué la maladie, ça a presque été un soulagement sur le moment parce que je savais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas avec moi. Étant petit, j’ai toujours été très bon dans les sports que je faisais mais vers l’âge de 10 ans, je n’y arrivais presque plus et je ne comprenais pas pourquoi. Le diagnostic m’a permis d’avoir une explication. Il n’empêche qu’après coup cela a été très dur.
Comment avez-vous commencé les compétitions ?
Vers l’âge de 26 ans, j’ai pris du poids à cause d’un médicament. Je ne pouvais faire ni de la course à pied ni du vélo tout seul en raison de la maladie. En revanche, je pouvais nager. Depuis que je suis petit, j’ai toujours adoré aller dans l’eau. Étant assez ambitieux, j’ai voulu faire le semi triathlon de Nyon en 2017. Je ne pouvais pas courir à ce moment-là, j’ai donc décidé de marcher à la place. Ensuite, il fallait trouver une solution pour la course vélo, j’ai donc décidé de le faire sur un tandem. C’est la première compétition que j’ai faite. J’étais trop fier de moi mais je ne suis pas quelqu’un qui veut faire les choses à moitié. Dès que j’ai terminé le semi-triathlon, je me suis dit qu’il fallait que je fasse le triathlon en entier.
C’est de là qu’est venue votre médiatisation ?
Oui, mais le côté médiatique ne m’intéresse pas du tout sauf s’il y a un but derrière, comme mettre mon association en valeur. Et justement, à l’époque de mon premier triathlon, je n’avais pas encore d’association. Puis, quelqu’un de la RTS m’a contacté dans le but de raconter mon histoire sous forme d’une série de quatre épisodes de cinq minutes et cela a fait prendre beaucoup d’ampleur à mon récit. C’est à partir de ce moment que nous avons décidé de créer notre association avec des collaborateurs : Sport4Hope. Par le biais de notre organisation, nous avons pu récolter et reverser 10 000 francs suisse au Téléthon.
Quelle est la mission de Sport4Hope ?
Donner de l’espoir à travers deux temporalités : pour le présent et pour le futur. L’espoir pour le futur consiste à donner une partie de l’argent qu’on récolte pour la recherche dans le cadre des maladies rares.Tandis que l’espoir au présent est ce qu’on peut faire maintenant pour profiter de la vie en étant malade. Il s’agit de faciliter l’accès aux sports aux personnes qui ont un handicap. Cette facette est très liée à mon histoire car c’est le sport qui m’a donné de l’espoir.
En 2019, vous avez réalisé le semi-ironman, pouvez-vous nous en parler ?
Il s’agissait de mon premier vrai gros défi. Pour vous dire la vérité, je ne me suis pas vraiment entraîné pour le semi triathlon et le triathlon. J’ai juste un peu nagé, fait un peu de vélo, mais je ne m’étais pas forcément préparé alors que pour le semi-ironman, je me suis entraîné pendant une année. Le semi-ironman, c’est 24h d’effort non-stop comprenant 1,9km de natation, 90km de vélo et 20km de course que je fais en marchant car je ne peux pas courir. C’était vraiment un gros challenge.
Je sais que si je peux encore marcher alors que d’autres personnes qui ont la même maladie que moi ne marchent plus, c’est grâce au sport.
Le dépassement de soi est au cœur de vos réalisations. Qu’est-ce qui vous a motivé jusqu’ici ?
Je sais que si je peux encore marcher alors que d’autres personnes qui ont la même maladie que moi ne marchent plus, c’est grâce au sport et plus particulièrement au foot. Quand ça n’allait pas bien, ce qui me poussait à me lever le matin, c’était les entraînements de foot pour les petits. J’adore nager, faire du vélo en tandem, c’est cool, mais mon sport, c’est le foot. Honnêtement, je peux dire que le foot m’a maintenu en vie à un moment donné, c’était ma raison de me lever.
Quel est le message que vous souhaitez faire passer au travers de votre association ?
C’est un peu cliché mais je dirais : Tout est possible. En tout cas, si on a un objectif, il faut se donner les moyens de le réaliser et ce n’est pas parce qu’on a un handicap, une maladie ou d’autres sortes de difficultés qu’il faut se laisser abattre et qu’on ne peut pas réaliser de belles et grandes choses.
Quelles sont vos inspirations ?
Nelson Mandela est une personne qui m’a beaucoup inspiré. On pourrait croire que ça n’a rien à voir avec le sport mais la première fois que je me suis intéressé à lui c’est à travers un film sur le sport : Invictus. Et puis, je dirais Kobe Bryant.
Quels sont vos projets futurs ?
Premièrement, c’est de faire l’Ironman en mai 2024. Et puis, j’aimerais faire quelque chose d’extraordinaire. Étant donné que la maladie est évolutive, chaque année, je suis censé réussir à faire moins que l’année précédente. Pourtant, chaque année, j’essaie de faire quelque chose de plus grand que ce que j’ai fait l’année d’avant. Psychologiquement, c’est important pour moi car je sais qu’un jour je ne pourrais plus le faire. Autant en profiter tant que mon corps me le permet encore.
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