Face aux problématiques de développement durable, les entreprises doivent se mettre à l’action. C’est ce que soutient Hallvard Bremnes, Global Head of Sustainability chez Givaudan. Curieux, aventureux et engagé, le Norvégien d’origine a voyagé dans le monde entier avant de revenir sur les terres romandes qui l’ont vu grandir. Il y a une quinzaine d’années, il rejoint le Groupe Givaudan pour y développer la partie santé, sécurité et environnement, avant que la société ne lui confie en 2019 la direction du développement durable. Dans cette interview, il nous explique en quoi ce rôle représente pour lui une aventure faite de sens.
Hallvard Bremnes, quelle est l’histoire de Givaudan ?
Tout a commencé il y a plus de 250 ans à Grasse, haut lieu historique de la parfumerie. Depuis, nous sommes devenus leader de l’industrie grâce à des ingrédients naturels, des innovations, des technologies et de nombreuses acquisitions. Aujourd’hui, le Groupe comptabilise plus de 16 200 collaborateurs, répartis à travers le monde. La raison d’être de Givaudan, qui permet de donner du sens à nos actions, est de créer pour des vies plus heureuses et plus saines avec l’amour de la nature. Il s’agit d’une invitation pour imaginer ces créations avec nos clients, grâce auxquels nous vivons un voyage fantastique.
Comment une entreprise comme Givaudan fait-elle pour répondre aux enjeux d’aujourd’hui tout en s’appuyant sur son héritage ?
Ce qui est intemporel, c’est le besoin de sens. Le monde d’aujourd’hui ne peut plus se satisfaire des intentions ; il faut passer des discours aux actions. C’est pourquoi nous passons de l’implicite à l’explicite grâce à des objectifs concrets qui ont un impact positif. La modernité est un modèle de croissance économique durable qui se présente sous différentes dimensions. Nous veillons à prendre soin de nos employés tout en agissant pour la protection du climat. Nous sommes également avant-gardistes en matière de durabilité des ressources et de protection de la biodiversité.
Pouvez-vous nous parler des principales mesures RSE que Givaudan a mis en place ces dernières années ?
La créativité et les émotions sont au cœur de notre métier. Chez Givaudan, nous avons intégré la durabilité dans notre approche créative à travers toute la chaîne de valeur. Par exemple, grâce à des programmes phares comme Climate Positive, nous nous engageons à éliminer les émissions de CO2, et avec notre programme Sourcing4Good, nous favorisons des pratiques d’approvisionnement responsable, inclusives et respectueuses des droits humains.
Un autre aspect important de notre stratégie concerne l’innovation technologique. Nous avons, par exemple, capitalisé sur notre technologie d’encapsulation des parfums, qui permet d’optimiser la rémanence des fragrances sur les vêtements. Cette avancée nous a permis de lancer sur le marché la première technologie d’encapsulation entièrement biodégradable PlanetCaps, alliant ainsi performance et respect de l’environnement.
Grâce à ces initiatives et bien d’autres, nous avons réussi à réduire les émissions de CO2 de nos opérations de 43 % en valeur absolue depuis 2015, tout en poursuivant le développement de Givaudan.
En quoi les grandes entreprises ont-elles une responsabilité en matière de RSE ?
C’est parce que les entreprises peuvent agir qu’elles doivent agir. Qui y a-t-il d’autres ? Il faut aussi prendre du recul, comprendre ce qui a mené au succès jusqu’à présent et ce qui va en apporter dans le futur. Les grandes entreprises peuvent agir plus vite car se projeter dans le futur est notre quotidien. Il ne suffit pas d’être grand, mais d’être courageux.
Comment transmettre l’intérêt des critères de la RSE à ses collaborateurs ?
Ce qu’il faut transmettre, ce n’est pas l’intérêt mais le sens, qui est intemporel. Le sens devient compris lorsqu’il y a des discours de preuves et lorsqu’on associe la crédibilité de nos actions à nos paroles. C’est à ce moment-là que l’on transmet le progrès, car nos collaborateurs se rendent compte et comprennent ce qui est fait. Par exemple, aujourd’hui, nous pouvons dire que 94 % de l’électricité que Givaudan utilise est verte et renouvelable. Cela est tangible et peut donc être compris.
Quelles sont les clés pour implémenter une stratégie de développement durable dans toutes les étapes de sa chaîne de valeur ?
Le premier ingrédient est de rendre le chemin désirable en étant humble et honnête sur les difficultés liées à la chaîne de valeur. L’honnêteté intellectuelle, c’est de se dire que tout n’est pas parfait, mais que c’est pour cela que nous abordons le sujet. Ensuite, il faut s’assurer en interne du niveau d’expertise et des connaissances requises de la chaîne de valeur. Nous savons d’où viennent les choses, ce qui nous permet d’identifier ce que l’on pourrait faire mieux. Le dernier ingrédient est l’engagement de l’organisation et la canalisation de l’énergie sur des objectifs chiffrés.
D’une manière générale, de quels leviers sont dotées les grandes entreprises pour être des sources d’inspiration pour d’autres organisations en matière de RSE ?
Il faut être actif sur les plateformes d’échanges d’expériences, ce qui permet de montrer ce qui marche ou ce qui ne marche pas. Le deuxième point est de répondre oui. Il y a deux ans, j’ai été invité au Parlement fédéral à Berne pour représenter les industries chimiques suisses dans un forum sur la décarbonation. Cela a été une expérience extraordinaire car j’ai non seulement été écouté, mais j’ai aussi été entendu. J’ai pu montrer ce que nous avons réussi à faire depuis dix ans grâce à notre travail, ce qui nous donne de la crédibilité. Le dernier point concerne l’attractivité d’une entreprise. Lorsqu’on fait les choses correctement depuis toujours, cela commence à se savoir. On attire ainsi des talents et on devient source d’inspiration au-delà de nos activités.
Images © Loris von Siebenthal
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