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Éditoriaux Industrie Moderne

La Suisse n’a pas besoin d’une politique industrielle

29.05.2024
par SMA
Philippe Cordonier,Ingénieur EPFL, Responsable Suisse romande, Swissmem

Philippe Cordonier
Ingénieur EPFL, Responsable Suisse romande, Swissmem

Le monde ne semble plus jurer que par deux mots: politique industrielle. De la Chine à l’Europe en passant par les États-Unis, les soutiens étatiques à l’économie se multiplient. La Suisse doit-elle suivre cet exemple pour soutenir son industrie ?

Les partis politiques de gauche en particulier réclame régulièrement de « sauver » l’industrie par des mesures de soutien étatiques. Ils peignent le diable sur la muraille d’une « désindustrialisation » de la Suisse et occultent le fait qu’en Suisse, près de 20 pour cent du produit intérieur brut est toujours généré par le secteur primaire et qu’il n’y a pas eu de désindustrialisation au cours des vingt dernières années, même pas en termes d’emplois.

Une « politique industrielle » est en effet un doux poison qui met du temps à agir. Dans un premier temps, il soulage quelque peu la douleur, notamment lorsque l’État verse des subventions aux entreprises en difficulté. À moyen et long terme, le poison montre son véritable effet toxique : le changement structurel est entravé par le statu quo. Les progrès de la productivité sont étouffés, l’innovation orientée vers le marché ne peut pas déployer ses effets positifs. Globalement, le secteur perd en compétitivité internationale. Pour maintenir le soulagement de la douleur, il faut augmenter le dosage avec de nouveaux moyens financiers payés par le contribuable.

Avec une politique industrielle, ce ne sont pas les gens ou le marché qui décident ce qui est bon ou adéquat pour l’avenir, c’est l’État.

La Suisse a jusqu’à présent résisté à cette tentation en ce qui concerne l’industrie. Elle devrait continuer à le faire en offrant principalement de bonnes conditions-cades aux entreprises. En effet, l’agriculture suisse nous a montré où cela mène. Elle est marquée par l’interventionnisme de l’ État et le cloisonnement du marché et doit être soutenue chaque année par de l’argent public à hauteur de plusieurs milliards.

Avec une politique industrielle, ce ne sont pas les gens ou le marché qui décident ce qui est bon ou adéquat pour l’avenir, c’est l’État. Pourtant il est clair que seul un contexte de politique économique dans lequel l’activité des entreprises et la créativité peuvent se déployer librement est judicieux pour l’avenir. Un contexte dans lequel les interventions et les réglementations étatiques sont réduites au strict nécessaire.

C’est pourquoi Swissmem rejette toute «politique industrielle». Une récente étude publiée par Avenir Suisse confirme cette position libérale. Swissmem s’engage par contre en faveur de conditions-cadres économiques adéquates, de marchés ouverts par des accords bilatéraux avec l’UE et des accords de libre-échange avec divers pays dans le monde (Chine, Inde) ainsi que pour un soutien fort à la formation, la recherche et l’innovation. Nous maintenons ainsi la Suisse en bonne forme pour qu’elle puisse surmonter les périodes de crise. Nous posons ainsi la première pierre angulaire pour que son industrie tech reste compétitive sur le long terme.

Texte Philippe Cordonier, Ingénieur EPFL, Responsable Suisse romande, Swissmem

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