Dans le domaine bancaire, la RSE est un sujet très vaste et dont la mise en action dépend souvent des stratégies des différentes institutions. Cependant, on observe depuis quelques années une volonté globale et commune de la part des acteurs du secteur de guider leur développement vers plus de durabilité. Candice Vogt nous explique pourquoi et comment dans cette interview.
Candice Vogt est Responsable RSE au sein de Piguet Galland & Cie SA, une banque privée romande. Ses missions consistent à déployer au sein de la banque des initiatives qui visent notamment à avoir un impact positif sur la société et l’environnement.
Candice Vogt, quels types de projets ou programmes RSE sont les plus courants dans le secteur financier ?
Aujourd’hui, je pense que la finance durable est en plein essor. Elle consiste notamment à répondre à la demande des clients en matière de solutions d’investissement responsable. Toutefois, les initiatives de durabilité ne se limitent pas à l’offre à la clientèle. La réduction des émissions de gaz à effet de serre constitue également un enjeu central dans le fonctionnement interne des banques. Tout comme les enjeux de diversité, d’inclusion et de bien-être des collaborateurs qui occupent aussi une place croissante. Enfin, de nombreuses banques s’engagent dans des actions philanthropiques, certaines allant jusqu’à créer leurs propres fondations pour soutenir diverses causes.
Quels outils ou méthodologies les institutions financières utilisent-elles pour évaluer leurs critères RSE ?
La première étape consiste à créer une matrice de matérialité, un outil permettant de dialoguer avec toutes les parties prenantes et de prendre en compte leurs attentes. Cela permet de déterminer les enjeux de l’entreprise et de définir ses priorités et axes d’amélioration. Ensuite, un ensemble d’organisations, de normes et de labels permettent de structurer, d’évaluer et de certifier les initiatives RSE des entreprises. Je pense notamment au Global Reporting Initiative, qui aide à élaborer des rapports de durabilité selon un certain standard, au label B Corp, qui reconnaît les bonnes pratiques en matière de RSE, aux outils d’égalité salariale, ainsi qu’à des initiatives comme le UN Global Compact et le Swiss Triple Impact en Suisse. Les institutions financières peuvent également choisir de faire partie de réseaux mondiaux tels que les Principes pour l’investissement responsable des Nations unies et la Net-Zero Banking Alliance.
Quels sont les avantages de l’adoption de pratiques RSE pour les entreprises du secteur financier ?
À mes yeux, il y en a beaucoup ! La durabilité n’est pas un coût, mais un investissement. Il faut se donner les moyens d’agir pour répondre aux attentes des parties prenantes. L’implémentation d’une stratégie RSE permet de mobiliser les collaborateurs sur un projet global, de renforcer la gestion des risques, d’améliorer l’image de marque, de stimuler l’innovation, d’attirer et de retenir les talents ainsi que les clients. En outre, les pratiques RSE peuvent améliorer la transparence et la responsabilité des entreprises, ce qui est crucial pour maintenir la confiance des investisseurs. Elles peuvent également conduire à des économies à long terme, par exemple grâce à une meilleure gestion des ressources et à des pratiques énergétiques plus efficaces. Enfin, les entreprises qui adoptent des pratiques RSE sont souvent mieux préparées à répondre aux défis futurs.
Le premier obstacle est souvent la résistance au changement, tant en interne qu’auprès des clients.
Comment les régulations et les politiques publiques influencent-elles les pratiques RSE dans la finance ?
Elles jouent un rôle crucial dans la promotion du développement durable au sein de la place financière. En Suisse, l’Association suisse des banquiers (ASB) émet des directives qui définissent des standards minimaux, facilitant ainsi l’adoption de pratiques plus durables par les institutions financières. Bien que certaines de ces régulations puissent sembler timides par rapport à d’autres juridictions, elles contribuent clairement à renforcer la transparence en matière de durabilité. Ces régulations sont essentielles pour accélérer l’adoption des mesures RSE, car elles établissent des standards et des attentes clairs pour les institutions financières.
Quels défis rencontrent les institutions financières dans la mise en œuvre de leurs stratégies RSE ?
Le premier obstacle est souvent la résistance au changement, tant en interne qu’auprès des clients. Il faut du temps pour s’adapter à de nouvelles pratiques et à des produits durables. Un autre défi majeur est la collecte et l’analyse des données nécessaires pour évaluer l’impact des initiatives RSE. Par exemple, les données sur les émissions de gaz à effet de serre peuvent être complexes à obtenir et à interpréter. De plus, il existe une diversité de définitions et de standards pour ce qui constitue un investissement durable, ce qui peut créer des ambiguïtés et des désaccords. Les institutions financières doivent également naviguer dans un paysage réglementaire particulièrement exigeant.
Comment ce défi peut-il être surmonté ?
Pour surmonter ces défis, il est essentiel de sensibiliser et de former les parties prenantes aux enjeux et aux bénéfices des pratiques durables. Intégrer ces pratiques de manière progressive, en démontrant leur valeur ajoutée, peut aider à réduire les résistances. La formation des collaborateurs est cruciale, notamment pour qu’ils puissent accompagner et conseiller efficacement la clientèle.
Comment voyez-vous l’évolution de l’adoption des mesures RSE dans le secteur financier ?
Je pense que c’est non seulement inévitable, mais essentiel pour garantir la durabilité et la responsabilité des institutions financières. Le secteur financier suisse est un acteur incontournable de la transition. En adoptant une approche proactive, il peut non seulement répondre aux défis actuels, mais aussi jouer un rôle de leader dans la transition vers une économie plus durable et responsable.
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