Interview par Alix Senault

Christoph Aeschlimann : Innover et se protéger face aux menaces

Allier innovation et IA tout en assurant la cybersécurité pour tous.

L’entreprise suisse Swisscom, dirigée par Christoph Aeschlimann, CEO depuis juin 2022, n’a de cesse d’innover au rythme soutenu des évolutions technologiques. L’essor de l’intelligence artificielle, le déploiement des réseaux et les enjeux de cybersécurité sont aujourd’hui des priorités stratégiques que le groupe entend développer de manière massive et continue.

Quelles sont aujourd’hui vos principales priorités en matière d’innovation technologique ?

L’évolution technologique a été fulgurante ces dernières années. Les capacités de l’intelligence artificielle sont quasiment illimitées, et il est crucial que les entreprises continuent d’innover et cela coule de source pour Swisscom : c’est le cœur de notre métier. L’IA est désormais présente dans de nombreuses fonctions : il faut donc investir en interne pour améliorer nos processus et nos services, mais aussi pour accompagner nos clients. Nous fournissons également des solutions pour les entreprises, notamment en matière de cybersécurité, qui est une de nos grandes priorités. Swisscom est aussi un acteur historique du cloud. Nous opérons aujourd’hui un cloud souverain, indépendant des pouvoirs politiques, c’est une alternative fiable et locale. Notre objectif est de garantir une maîtrise totale de l’infrastructure et sa sécurité.

Quels sont les projets stratégiques de Swisscom dans le domaine de l’intelligence artificielle ?

Nous avons étendu notre offre cloud classique avec une solution d’IA 100 % suisse à destination de nos clients professionnels. Ce cloud IA peut aussi héberger des modèles (LLM) développé avec l’aide des EPF. Nous lançons également notre propre version de GPT, un ChatGPT indépendant ainsi qu’une solution polyvalente de sécurité et mise en réseaux utilisant l’IA pour assurer la sécurité nommé beem.

Christoph Aeschlimann

L’IA devient incontournable : sans elle, il est aujourd’hui impossible d’atteindre certains niveaux de qualité et de réactivité. Par exemple, si une antenne tombe en panne, l’IA pilote en direct et permet à d’autres antennes de prendre automatiquement le relais en optimisant le signal en fonction des conditions météo. De même, dans nos services de support, l’IA nous aide à mieux accompagner nos clients et à être plus réactif, à tout moment.

Comment Swisscom veille-t-elle à intégrer l’IA de manière responsable et éthique ?

Chez Swisscom, nous tenons à utiliser les technologies de façon responsable et sécurisée. Il faut que nos clients puissent avoir confiance en une technologie sure et fiable. Pour cela, nous avons mis en place un comité d’éthique chargé de veiller à la transparence des algorithmes et au bon traitement des données. La cybersécurité et la durabilité sont aussi des piliers essentiels : notre consommation d’énergie reste stable grâce à des équipements performants, que nous renouvelons régulièrement pour remplacer les plus énergivores.

Où en est le déploiement de la 5G en Suisse et quels en sont ses avantages ?

La 2G a disparu il y a quatre ans, et la 3G s’apprête à faire de même. La 5G est désormais largement déployée sur tout le territoire et ne présente pas de risques avérés – elle est utilisée en Suisse depuis déjà six ans, dans le cadre d’une réglementation parmi les plus strictes au monde.

La 5G permet d’ailleurs de réduire les rayonnements grâce à son efficacité : les antennes ciblées minimisent l’impact environnemental. On peut ainsi profiter d’un réseau mobile haut débit rapide et profiter pleinement de possibilité qu’il permet.

Comment accompagnez-vous les entreprises face à la recrudescence des cyberattaques ?

Nous proposons un accompagnement complet, allant du conseil à la formation, avec un service de surveillance 24h/24 et 7j/7 pour prévenir les attaques.

En mai dernier, nous avons lancé une nouvelle gamme de produits baptisée beem, combinant connectivité et cybersécurité. Cette offre 2-en-1 intègre un VPN et une sécurité renforcée, avec moins d’accessoires nécessaires pour assurer une veille constante sur les différentes menaces existantes. Nous collaborons avec des partenaires, des organismes spécialisés et des lanceurs d’alerte pour rester à jour sur les dernières méthodes d’attaque.

Quels sont les grands chantiers technologiques à horizon 2030 ?

Les deux axes majeurs sont sans aucun doute l’IA et la cybersécurité. Swisscom investit fortement dans les startups pour renforcer l’écosystème technologique suisse à l’international. Nous avons lancé « Deep Tech Nation Switzerland », une fondation dédiée au soutien de l’innovation et des technologies au cœur de la Suisse, pour promouvoir et soutenir les startups et jeunes sociétés innovantes et locales de la tech.

L’innovation passe-t-elle aussi par des partenariats externes ?

Absolument. En plus des startups, nous travaillons en étroite collaboration avec les EPF. Nous construisons un écosystème solide, avec des partenariats internationaux, notamment en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Ces acteurs disposent de solides capacités de R&D.

L’IA bouleverse tout et à grande vitesse. L’une des prochaines innovations majeures pourrait être un « IA phone », une nouvelle génération d’appareils portables. Par exemple, notre dernière borne Wi-Fi offre déjà des performances exceptionnelles. Dans certains contextes, comme les hôpitaux, le réseau mobile peut même remplacer le Wi-Fi pour garantir un meilleur pilotage et une connexion partout pour tous les collaborateurs.

Comment travaillez-vous avec les pouvoirs publics pour renforcer la cybersécurité à l’échelle nationale et européenne ?

Nous collaborons activement avec des partenaires comme Microsoft ou Google, mais aussi avec la Confédération suisse. Ces échanges sont indispensables pour anticiper les menaces et renforcer nos défenses collectives.

Comment restez-vous en veille sur les grandes tendances technologiques ?

La veille technologique est indispensable. Elle passe par la lecture de la presse spécialisée, la participation à des salons et conférences, et les échanges avec des cabinets de conseil, des experts en capital-risque ou private equity.

Je discute aussi régulièrement avec d’autres CEO et acteurs influents. Il est essentiel de garder les yeux et les oreilles ouverts. Aujourd’hui plus que jamais, il faut savoir faire le tri entre bruit et information réelle. Multiplier les points de vue permet de construire une vision stratégique solide et à long terme.

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27.08.2025
par Alix Senault
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