Véritable orfèvre de l’histoire, spécialisé dans sa vulgarisation, Benjamin Brillaud a lancé sa chaîne YouTube Nota Bene en 2014. Ce créateur de contenu prolifique réunit aujourd’hui plus de 2,6 millions d’abonnés. Son succès repose sur une recette efficace : des faits historiques rigoureusement documentés, parfois fantasmés, souvent brutaux, mais toujours captivants. Depuis plus d’une décennie, Nota Bene explore, décrypte et met en lumière les événements marquants de l’Histoire avec habileté et curiosité, séduisant un public toujours plus fidèle et engagé. Rencontre avec un conteur moderne qui a su redonner vie au passé.
Benjamin Brillaud, pouvez-vous nous raconter votre parcours et expliquer comment vous êtes devenu créateur de contenu ?
Ma passion pour l’histoire est arrivée assez tardivement. J’ai grandi avec un père cinéphile, je regardais beaucoup de film dans tous les registres, ce qui m’a beaucoup ouvert à l’imaginaire. Après un bac électronique, j’ai commencé la fac d’histoire, par curiosité, mais je n’y suis resté qu’environ six mois. Rapidement, j’ai eu l’opportunité de travailler avec un réalisateur sur un projet audiovisuel et je me suis lancé dans des études de production audiovisuelle à Paris. J’ai alors commencé ma carrière à la production technique de films.
En 2014, j’ai déménagé à Tours et découvert avec fascination YouTube et ses contenus variés. Je me suis rendu compte qu’il y avait une vraie place pour une chaîne dédiée à l’histoire. J’ai donc réalisé mes premières vidéos en août 2014 et, dès novembre, j’ai compris que ça pouvait devenir mon métier. Les planètes étaient alignées j’ai eu beaucoup de chance, mais le succès résulte aussi énormément du travail.
Dès 2015, je collabore avec le musée du Louvre et d’autres institutions. Peu à peu, les partenariats se multiplient et Nota Bene prend de l’ampleur. Aujourd’hui, nous sommes une équipe de dix personnes en CDI, avec des auteurs, des partenaires et différents projets d’écriture. Mon objectif a toujours été de créer un pont entre la recherche et le grand public. Je veux proposer une émission factuelle, accessible, mais aussi critique : montrer comment l’histoire s’écrit, par qui, et pourquoi, afin de renforcer l’esprit critique des spectateurs.
Pourquoi, selon vous, les faits historiques et les cultures anciennes suscitent-ils un tel engouement ?
L’histoire suscite toujours un fort engouement, car elle nous permet de comprendre les mécanismes qui façonnent notre société. Il y a aussi une dimension narrative : les histoires humaines, les destins, les conflits, les inventions… Tout cela nous captive naturellement.
Je pense que l’histoire parle à tout le monde, quelle que soit sa passion dans la vie, car on peut toujours faire des ponts avec ses centre d’intérêts. L’un de mes objectifs est de casser les idées reçues : l’histoire ne se résume pas à une suite de guerres ou aux exploits des puissants. Elle est plurielle et concerne aussi les gens ordinaires, les cultures, les croyances, les échanges. Beaucoup de gens pensent que l’histoire est une discipline élitiste, mais en réalité, elle peut être accessible à tous. Et avec Nota Bene, j’essaie de le démontrer.
Quelle est votre méthodologie de travail pour vulgariser des sujets complexes dans vos vidéos ?
La première étape, c’est la documentation. Avec mes équipes, nous nous plongeons dans des recherches approfondies et faisons appel à des historiens et archéologues spécialisés pour établir un premier jet, véritable base de travail. Vient ensuite la définition de l’angle du sujet, toujours appuyé par un expert pour garantir la solidité du fond. L’exactitude des informations est primordiale : rien n’est retranscrit sans vérification minutieuse, avant d’être adapté au style « Nota Bene ». L’objectif : rendre accessibles et attrayants les sujets les plus complexes. Enfin, nous collaborons régulièrement avec des institutions reconnues – musées, universités, associations – afin d’assurer la fiabilité et la rigueur des contenus.
Comment trouvez-vous les idées de vos prochains sujets de vidéos ?
Il y a plusieurs sources d’inspiration. Certains sujets reviennent chaque année, comme des marronniers liés à l’actualité historique. Des historiens me proposent parfois des thèmes originaux, avec des angles inédits auxquels je n’avais pas pensé. Des idées de sujets me viennent également spontanément, je pense notamment à la fois où, je me suis demandé si le ski se pratiquait déjà au Moyen-Âge (rires), finalement ça a donné l’idée principale du développement d’un sujet de sports extrêmes à cette époque !
Je reçois aussi énormément de suggestions de la part des internautes : certaines sont excellentes, d’autres un peu moins (rires). Enfin, les partenariats avec des musées, des collectivités ou des institutions permettent de développer des vidéos spécifiques, avec une approche enrichie.
Avez-vous des projets en cours de développement ?
Pour l’instant, je reste concentré sur la chaîne YouTube et sur la production d’épisodes ambitieux, notamment des séries thématiques complexes, souvent réalisées avec des spécialistes pour garantir la qualité.
Parallèlement, je travaille sur plusieurs projets éditoriaux : chaque année, nous dirigeons des ouvrages collectifs sur des thèmes comme les Vikings, les samouraïs, les pirates, et le prochain portera sur les chevaliers… et les chevaleresses. L’objectif est aussi de remettre en lumière la place des femmes dans l’histoire, souvent invisibilisée par des récits rédigés essentiellement par des hommes. Nous travaillons aussi sur une série consacrée aux Outre-mer, prévue pour 2026, afin de découvrir l’histoire de la Martinique, de la Guadeloupe, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de la Nouvelle-Calédonie et d’autres territoires. Nous y aborderons notamment la période post-coloniale.
L’ambition de Nota Bene reste la même : élargir le regard, ne pas se limiter à la France, mais parler de la francophonie dans son ensemble.
Interview Alix Senault
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