Interview par SMA

Quentin Fillon Maillet : « Les Jeux d’hiver de 2030 en France ? Un sacré défi pour boucler ma carrière »

Double champion olympique de biathlon à Pékin en 2022, Quentin Fillon Maillet reste fidèle à ses racines jurassiennes. À l’aube des Jeux d’hiver de Milan Cortina 2026, le biathlète de 33 ans évoque son attachement à son territoire, son rapport au succès et le défi de conclure sa carrière en beauté.

Double champion olympique de biathlon à Pékin en 2022, Quentin Fillon Maillet reste fidèle à ses racines jurassiennes. À l’aube des Jeux d’hiver de Milan Cortina 2026, le biathlète de 33 ans évoque son attachement à son territoire, son rapport au succès et le défi de conclure sa carrière en beauté.

Quentin Fillon Maillet, vous avez grandi et vous vivez toujours dans le Jura. Qu’est-ce que ce territoire représente pour vous aujourd’hui ?

Il représente beaucoup et colle à l’homme que je suis devenu car il m’a forgé. J’y ai découvert le sport, dans les traces de mes parents, fait mes études. J’y ai tous mes souvenirs. Je n’ai jamais envisagé habiter ailleurs. Pour quelqu’un qui aime les sports de plein air et qui ne peut pas s’en passer, c’est le territoire idéal. J’aime la culture de mon département.

Vous avez souvent évoqué votre goût pour la précision et le matériel. En quoi cette recherche du détail reflète-t-elle aussi la culture du Jura, terre d’artisans et de savoir-faire ?

Nous sommes tout près de la Vallée de Joux, en Suisse, siège d’Audemars Piguet et de nombreuses entreprises horlogères. Nous sommes la région du Comté, peaufiné avec méthode par nos fromagers. Ma famille a développé une belle entreprise de menuiserie. Enfant, j’ai fabriqué des arbalètes et aujourd’hui, je travaille sur les crosses de ma carabine. Effectivement, nous avons un sens du détail et des choses bien conçues qui, quand on est sportif de haut niveau, sont des atouts.

Vous êtes un ambassadeur de votre région. Quelles initiatives locales vous tiennent particulièrement à cœur ?

Je suis très fier d’avoir le logo du Jura sur la crosse de ma carabine tout comme je suis heureux d’être le parrain du Club des ambassadeurs du Jura, qui « fédère » les Jurassiens qui portent les valeurs du département dans le monde entier. Je suis très attaché à mon terroir, à ses fêtes et à tout ce qui met en avant les réalisations de mon territoire.

Qu’est-ce qui continue de vous motiver au quotidien, après avoir atteint les plus hauts sommets ?

Je n’ai jamais fait du sport pour la gloire et les honneurs mais parce que j’aime profondément m’entraîner, me dépasser, gagner.

Image Yves Perret / YP Médias

Image Yves Perret / YP Médias

On entend souvent que le sport de haut niveau est une école d’humilité. Quelle a été la période la plus formatrice de votre carrière ?

Il y a dans toute carrière des hauts et des bas. Les Jeux de 2018 en Corée ont été une épreuve. Ma compagne et mon beau-père souffraient d’un cancer et ce fut terrible à vivre. La saison 2022, d’un autre côté, a été aussi une belle école. J’ai appris à gagner régulièrement, à gérer les sollicitations, à vivre avec une autre pression, un autre statut.

Votre image dépasse aujourd’hui le cadre du biathlon. Comment conciliez-vous cette notoriété avec vos valeurs ?

Je ne suis pas un footballeur ou un pilote de F1. Il y a des sollicitations mais cela reste gérable. Je ne passe pas ma vie à Paris ou dans des soirées. Les marques de sympathie sont toujours sympas. Cela me fait plaisir. J’espère que je n’ai pas changé. En tout cas, la réussite n’a pas bouleversé ma vie. J’ai toujours les mêmes amis, j’habite dans le Haut-Jura, dans un lieu paisible. Et je n’ai pas envie que cela change. Je suis un sportif avant d’être un personnage public.

Que souhaitez-vous transmettre, au-delà des performances et des médailles ?

Tout repose sur le travail, la ténacité, le sérieux, le sens du détail et la simplicité. Il faut aimer le sport, aimer se dépasser, avant de penser aux titres et à la gloire.

On parle beaucoup du renouveau des territoires de montagne. Comment percevez-vous cette transition et le rôle que les sportifs peuvent y jouer ?

Nous devons être exemplaires, tout en étant conscients que le sport de haut niveau nécessite des déplacements et a un impact. J’aime la nature et les montagnes. Je ne peux pas me résoudre à les voir s’altérer. Mais il faut repenser certains modèles de développement.

Les Jeux olympiques d’hiver 2030, attribués à la France, marquent un retour historique. Qu’est-ce que cette perspective éveille en vous ?

En février, les Jeux de Milan Cortina en 2026 seront les quatrièmes de ma carrière et mes premiers dans un véritable univers montagnard alpin et en Europe. Je suis vraiment content de pouvoir vivre cela, avec mes supporters et ma famille. Les Jeux de Pékin, en période Covid, avaient laissé une impression étrange. Qu’en 2030, ils soient organisés en France est une belle opportunité pour notre pays. Ils devront montrer aussi que le sport et l’Olympisme ont réussi leur mutation et se seront adaptés aux valeurs environnementales et sociétales actuelles. J’aurai 37 ans, je me dis que ce serait un sacré défi pour boucler ma carrière.

Interview Marc-Antoine Guet

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18.12.2025
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